Les femmes entrepreneures tempèrent la folie des fusions et acquisitions

Une récente étude de l'Université de Colombie Britannique à Vancouver montre que le prix qu'une entreprise paie pour en acheter une autre baisse en fonction du nombre de femmes siégeant à son conseil d'administration. 
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Les femmes entrepreneures tempèrent la folie des fusions et acquisitions
Le pourcentage moyen de femmes dans les conseils d'administration et de surveillance des entreprises du CAC 40 est de 24% soit moins d'un quart. (photo AFP)
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Conquérir de nouveaux territoires, bâtir un empire, même, régner et passer à la postérité : tel est le désir de ces mâles alpha, que l'on retrouve aussi bien chez les animaux que chez les humains. Ils sont ainsi nombreux aux postes de responsabilités dans les entreprises. Et cela n'a pas que des avantages. Au contraire... Dans le monde des affaires, conquérir de nouveaux territoires signifie souvent faire une offre d'achat sur une entreprise concurrente ou complémentaire. Et pour les hommes, à n'importe quel prix, qui plus est ! Seule une présence féminine au conseil d'administration de l'entreprise offrante est de nature à faire baisser le coût de telles opérations...   Corrélation entre femmes et prix d'acquisition   C'est en effet ce qui ressort d'une étude, récemment publiée par l'Université de Colombie Britannique à Vancouver, et réalisée sur près de 500 opérations de fusions et acquisitions, effectuées entre 1997 et 2009 par des sociétés cotées. En comparant la différence entre le prix offert pour l'achat à celui établi par le cours de bourse de la société ciblée, puis, en mettant cette donnée en face du nombre de femmes siégeant au conseil d'administration de la société souhaitant acquérir l'autre, les professeurs de finance de l'Université de Colombie Britannique ont relevé une correspondance entre le prix de l'acquisition et le nombre d'administratrices. Une seule femme au conseil d'administration suffit à faire baisser le prix de plus de 15%. Autant d'économies pour l'entreprise offrante ! En outre, la présence d'au moins une administratrice fait également reculer le nombre de propositions de rapprochement de près de 8%. Une seule femme permet ainsi à une entreprise de tempérer ses ardeurs, au lieu de se lancer dans une stratégie qui pourrait s'avérer aventuriste.   Enfin, lorsque le nombre d'administratrices passe à deux ou plus, le prix et le nombre des propositions d'acquisitions baissent encore plus... Kai Li, une professeure de finance qui a participé à l'enquête canadienne, prévient cependant que cette évolution ne serait pas toujours proportionnelle. Certes, mais toujours est-il que les femmes, moins guidées que les mâles alpha par une volonté de puissance et de gloire, semble-t-il, ou, selon la professeure Kai Li, moins confiantes dans leur jugement ou la valeur de la société ciblée que les hommes, se rangent toujours du côté de la modération.   Une étude clé dans le débat Le résultat des recherches canadiennes, qui ne laissent pas de doute sur le lien entre baisse des prix des acquisitions et présence de femmes au conseil d'administration, tombe à point. Alors qu'à la fin de l'an dernier, le Parlement européen a approuvé la proposition de loi appelant à un quota de 40% d'administratrices d'ici 2020, le débat se poursuit entre partisans de quotas pour féminiser les conseils et détracteurs d'un tel dispositif. Les premiers, souvent en Europe continentale, estiment qu'il faut légiférer pour obtenir des résultats, les seconds, généralement anglo-saxons, qu'il faut laisser les entreprises agir de leur propre chef. Pour compliquer le tout, les études concernant l'impact positif d'une féminisation des conseils sur la performance financière de l'entreprise restent sujettes à caution, certains considérant qu'il s'agit d'une simple coïncidence, sans corrélation avérée, tandis que d'autres estiment que le rapport de cause à effet est inversé. Ce seraient des entreprises déjà performantes et rentables qui se “paieraient le luxe” de nommer des femmes à leurs conseils ! Les résultats publiés par l'Université de Colombie Britannique, pour partiels qu'ils soient, puisqu'ils ne concernent que les opérations de fusions et acquisitions, pourraient cependant faire avancer le débat - à défaut de le clore définitivement.

Lysiane J.Baudu

Lysiane J.Baudu
Ancienne grand reporter à La Tribune, Lysiane J. Baudu a rencontré, pendant ses 20 ans de journalisme international, des femmes du monde entier. 
Ces "rencontres" feront l'objet de billets, qui lui permettront de faire partager ses impressions, ses analyses, son ressenti au contact de ces femmes, dont l'action professionnelle fait sens pour toutes les autres, de même que pour la société.