Les Françaises font de moins en moins d'enfants : dix ans de natalité en baisse

Pourquoi la natalité décroche-t-elle en France, pays d'Europe où la natalité est l'une des plus élevée d'Europe ? Le nombre de naissances y a reculé de 7% sur les huit premiers mois de l'année 2023, alors qu'il était déjà, en 2022, au plus bas depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

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Porte-bébé Rookie, 2 août 2022

©​​​​​​​Rookie Berlin GmbH/news aktuell via AP Images
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"En cumul sur les huit premiers mois de l'année, on compte environ 35 000 naissances de moins en 2023 qu'en 2022, soit une baisse de 7,2%", précise l'Institut national de la statistique (Insee) français. "Si cette tendance se poursuit, le nombre de naissances devrait passer sous la barre symbolique de 700 000 en 2023", commente Chloé Tavan, cheffe de la division enquêtes et études démographiques à l'Insee.

Un baby-krach pour 2023 ?

En août 2023, la France a enregistré son 14e mois consécutif de baisse : 1 896 bébés sont nés en moyenne par jour, soit 8,3% de moins qu'en août 2022. Les huit premiers mois de l'année préfigurent-ils d'un baby-krach pour 2023 ? "L'année 2023 risque de marquer un nouveau plus bas historique, un vrai décrochage", abonde Didier Breton, professeur de démographie à l'université de Strasbourg.

Ces chiffres de la natalité surviennent après une année déjà morose pour les berceaux : 726 000 bébés sont nés en 2022, soit 2,2% de moins qu'en 2021. Il s'agissait du nombre de naissances le plus bas depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, rapporte l'Insee. 

Depuis 2011, le nombre de naissances recule chaque année, à l'exception d'un léger rebond en 2021, année qui suivait les confinements liés au Covid-19. "Par rapport au pic de l'après-guerre, les naissances sont en recul de 20,8%". Et elles sont en baisse de 12,8% par rapport à 2010, selon l'Insee.

insee naissances

Maternités tardives

Le recul des naissances s'observe dans toutes les régions de France, sauf à Mayotte et en Corse – et dans toutes les classes d'âge, à l'exception des quadragénaires. Reflet des maternités plus tardives, le nombre de naissances issues de mères de 40 ans et plus augmente ainsi de 3,3% entre 2021 et 2022. Parallèlement, les naissances ont reculé de 2,7% chez les femmes de 25 à 29 ans, et de 3,6% chez les 30-34 ans.

"Si les couples ajournent leur projet d'enfant, ils peuvent faire face à des problèmes de fertilité et constituer des familles moins nombreuses. Didier Breton 

"Si les couples ajournent leur projet d'enfant, ils peuvent se retrouver face à des problèmes de fertilité et constituer des familles moins nombreuses", observe Didier Breton. L'Insee fait état d'un accroissement de l'âge moyen à la maternité, qui atteint 31,2 ans, contre 26 ans dans la seconde moitié des années 1970. Le même recul démographique s'observe à travers l'Union européenne, plus ou moins marqué.

Fin de l'exception française ?

La France, qui faisait exception en Europe, se rapproche maintenant des autres pays de l'UE, où les naissances ont reculé de 5% en moyenne entre 2021 et 2022 : -2% en Espagne et en Italie, -7% en Allemagne, -8% en Pologne, selon Chloé Tavan.

La France converge vers un modèle de fécondité qu'on observe en Europe, de 1,5 enfant par femme. Didier Breton

"La France converge vers un modèle de fécondité qu'on observe en Europe, de 1,5 enfant par femme. On est à 1,8 : on risque de passer à 1,7 en 2023, commente Didier Breton, également chercheur associé à l'Institut national d'études démographiques (Ined). Ce serait la fin de la singularité française dont les explications seraient multiples : baisse du désir d'enfant, fin de l'universalité de la politique familiale, désormais conditionnée aux revenus...", relève-t-il.

Le contrat social français en danger ?

68% des nouveaux-nés ont des parents tous deux nés en France. Dix ans auparavant c'était le cas des trois quarts des naissances (73%). Pour François Bayrou, Haut-commissaire au Plan, cité dans La Croix, "le discours catastrophiste qui se propage dans le pays est l'une des causes de cet effondrement".

Celui qui est également le patron du Modem, un parti membre de la majorité présidentielle, met en garde : "Notre contrat social est entièrement fondé sur notre capacité démographique. Dès l'instant où la base de la pyramide se rétrécit, il devient impossible de maintenir ce système."