Les Suissesses, bonnes dernières du droit de vote

Parce que les Suisses pratiquent fréquemment le référendum populaire sur toutes sortes de sujet de société (le dernier en date, en février 2011, interdisait l'érection supplémentaire de minarets), les femmes de la Confédération helvétique n'ont conquis leur droit de vote qu'en 1971, bonnes dernières du Vieux continent. Un paradoxe dans ce pays qui s'est toujours prétendu pionnier des droits humains et civiques.
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Les Suissesses, bonnes dernières du droit de vote
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Les Suissesses, bonnes dernières du droit de vote
La Une du Temps du 7 février 2011
Le Temps de Genève du 7 février 2011, qui tenait à célébrer dignement une autre révolution, fort tardive en Suisse, celle du vote des femmes, qu’elles n’ont arraché de haute lutte, et encore pas dans tous les cantons, en 1971, bonnes dernières en Europe… Le combat des féministes suisses est né en 1912, avec le lancement du mensuel "Le mouvement féministe", dont la fondatrice et éditorialiste commence son premier billet avec cette adresse, paradoxale à première vue : "À nos lecteurs", sauf si Emilie Gourd pensait ainsi opérer un entrisme stratégique... En 1959, nous apprend le quotidien, et malgré un siècle de combats dans la foulée de la pionnière Marie Goegg-Pouchoulin , huguenote et mère de famille et divorcée qui lança Le Journal des femmes en 1870, près de 70% d’électeurs suisses – des hommes donc -, refusent d’accorder le droit de vote aux femmes, parce qu’ils craignent que leurs épouses, mères, sœurs, filles, une fois devenues citoyennes ne délaissent leurs fourneaux, leurs maris et leurs enfants.
Les Suissesses, bonnes dernières du droit de vote
Marie Goegg-Pouchoulin, 1899, 1926, la “mère“ des féministes suisses.
QUAND LES FEMMES S'ALIGNENT SUR LES HOMMES ! Aujourd’hui, quarante ans plus tard de droit de vote, où en sont-elles ? Deux femmes veillent aujourd’hui sur la destinée du pays, Doris Leuthard présidente de la Confédération jusqu'à la fin de l'année 2010, et Micheline Calmy-Rey qui lui a succédé après avoir conduit la diplomatie de cet îlot encore et toujours hors de l'Union européenne. Partout, les Suissesses poussent les hommes, bousculent les idées reçues et tentent d’infléchir leur pays vers plus de social et plus d’écologie. Le 13 février dernier, elles n'ont cependant pas réussi à obliger les hommes à enfermer sous clés leurs armes, comme les sondeurs le prévoyaient lors de la dernière votation populaire de poids dans la Confédération. La Suisse est en effet l’un des pays où le plus grand nombre d’armes circulent, en toute légalité, et où – presque – chacun possède un fusil à la maison, petits États-Unis en miniature… Par référendum, les électeurs helvètes devaient donc décider de déposer (ou non) leurs armes en les rangeant dans les casernes, et en les inscrivant dans un registre national. Grâce aux femmes, cette initiative semblait devoir être acceptée, et les hommes contraints de ne plus jouer avec leurs révolvers et autres avatars phalliques. Il n'en a rien été. Par 56,3 %, l'initiative venue de la gauche et des pacifistes a été repoussée. On soupçonne même nombre de femmes d'avoir voté contre !