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L'espace vital des femmes vu par les photographes iraniennes

Anahita Ghabaian invite à regarder l’Iran à travers l’objectif des femmes, dans un contexte où les femmes y revendiquent leurs droits avec détermination et courage. Engagement et poésie sont les maîtres mots du recueil de photographie Espace vital, femmes photographes iraniennes. 

C'est un livre qui nous invite à découvrir la société iranienne à travers l'objectif de 23 femmes de trois générations différentes. Espace Vital, femmes photographes iraniennes est signé Anahita Ghabaian Etehadieh, spécialiste de la photographie iranienne et fondatrice de Silk Road, à Téhéran, première galerie consacrée exclusivement à la photographie. 

La photographie est un art jeune en Iran, où elle n'est pas tout à fait intégrée au domaine de l'art. Peu à peu, toutefois, elle ouvre sa voie, comme l'explique Anahita Ghabaian Etehadieh : "La photographie n'est pas complètement acceptée comme de l'art, mais de plus en plus de photographes la pratiquent, elle est enseignée à l'université et existe dans différentes collections, en Iran et à l'étranger."

La photo, espace de liberté

couv Espace vital, femmes photographes iraniennes
Détail de la couverture du livre Espace vital, femmes photographes iraniennes, paru en 2023 aux éditions Textuel.
Espace Vital, femmes photographes iraniennes – un titre qui en dit long. Pour les Iraniennes, la photographie est un moyen de s'exprimer, de résister, un espace de liberté, pense Anahita Ghabaian Etehadieh : "Cela leur permet de s'exprimer à travers les images, sans avoir besoin des mots. Pour moi, c'est aussi un espace vital dans la mesure où je peux organiser ces photos comme je le veux pour raconter l'Histoire, mais aussi des histoires sur la société, sur les différentes questions qui se posent à elle."

Présenter des photos prises d'un point de vue féminin, tel est le fil conducteur du livre, explique Anahita Ghabaian Etehadieh. "Même si le féminisme est omniprésent, plusieurs sujets sont traités, comme l'environnement, le rapport au corps, à l'intime, un regard sur le passé ou la notion de disparition."

Féminisme omniprésent, mais pas seulement

iranienne fer à repasser
©Shadi Ghadirian
Espace Vital, femmes photographes iraniennes présente, entre autres, les photos de Shadi Ghadirian. Les femmes portent un tchador, le visage couvert par des ustensiles ménagers, gants ou fer à repasser. Son message est très clair, selon Anahita Ghabaian Etehadieh : "Pour elle, il faut mettre fin à tout cela. Comme elle dit elle-même, elle trouve absurde que les femmes continuent à assumer toutes les tâches ménagères. C'est ce qu'elle veut dénoncer de son point de vue de féministe."

Messages

La guerre entre l'Iran et l'Irak, entre 1980 et 1988, a beaucoup marqué les Iraniens. Elle reste un sujet omniprésent, comme le montre l'oeuvre de Gohar Dashit qui représente un couple attablé devant un tank. "On parle encore beaucoup de la guerre, surtout d'un point de vue féminin. Gohar Dashit raconte dans cette série de quelle manière la vie peut continuer alors qu'une gerre fait rage. La guerre, c'est la tragédie, la douleur, mais à côté, la vie continue. Au quotidien, on mange ensemble, on célèbre un anniversaire..."

Gohar Dashti dîner au char
©Gohar Dashti

Prises en 2006, les photos de Yalda Moaiery illustrent la pression exercée sur les femmes en Iran. L'une d'elles montre deux femmes arrêtées par une officière de police pour n'avoir pas porté correctement le hijab. "Cette police des moeurs est active depuis 2006, explique Anahita Ghabaian Etehadieh. Tout de suite, Yalda Moaiery a demandé l'autorisation de suivre les policiers et les policières à l'oeuvre. Selon la loi, les femmes n'ont pas le droit de porter des habits ajustés ou de mal porter le voile. On ne sait pas ce qui va se passer pour ces deux femmes, mais c'est une scène hélas très courante." 

iraniennes arrêtées
©Shadi Ghadirian