Maude Bergeron, championne de boxe québécoise, par delà la surdité

Victime d’une méningite à l’âge d’un an, Maude Bergeron a développé une surdité profonde. Un handicap qu’elle a appris à surmonter en grande partie grâce à sa passion : la boxe. Depuis neuf ans, la pugiliste qui a raflé le titre de championne canadienne à trois reprises s’entraine d’arrache pied afin de réaliser son rêve, devenir boxeuse professionnelle.
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Maude Bergeron, championne de boxe québécoise, par delà la surdité
Maude Bergeron sur le ring, là où elle se réalise
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Sur le ring, Maude n’entend pas les applaudissements de la foule. Elle n’entend pas non plus les instructions de son entraineur, ni même le son de la cloche qui annonce la fin des “rounds”. Pourtant, dès que le combat commence, Maude se transforme en une tornade aux crochets, directs et jabs redoutables. En neuf ans de carrière, la boxeuse de 24 ans s’est d’ailleurs taillée une place de choix sur le circuit international de la boxe amateur féminine. Trois fois championne canadienne, elle occupe à présent le 10ème rang mondial dans la catégorie des 81kg.

Lorsqu’on lui demande si elle voit sa surdité comme un handicap sur le ring, Maude répond humblement : “Je n’ai jamais connu autre chose donc je ne vois pas ca comme une difficulté à surmonter”. “Par contre, il m’est déjà arrivé de ne pas me rendre compte que l’arbitre avait arrêté le combat, parce que je n’entends pas la cloche. Donc j’ai continué à me battre. Mon adversaire n’a pas apprécié”, ajoute-t-elle en rigolant.

Le hasard et la nécessité

C’est pourtant un peu par hasard que Maude a atterri, à l’âge de 16 ans, dans un club de boxe de région, près de Montréal. “J’avais essayé plusieurs sports d’équipe comme le basketball et la ringuette (sorte de hockey sur glace, ndlr), mais aucun ne me convenaient. Je cherchais un sport individuel. Je ne sais pas si c’est dû à ma surdité, mais je préfère être seule et perdre ou gagner en solitaire”, explique-t-elle. C’est en faisant des recherches sur Internet que Maude a eu l’idée d’essayer la boxe. “Je m’attendais à tomber sur des gars durs avec des gros bras. Mais pas du tout ! Tout le monde dans la gym m’a accueillie comme si j’étais déjà des leurs. Depuis, j’ai la piqûre”.

Maude Bergeron, championne de boxe québécoise, par delà la surdité
“Dès que j’ai commencé à frapper, j’ai ressenti un si grand bien ! Pourtant, je n’étais pas quelqu’un qui ressentait de la colère ou un besoin de frapper… Mais il faut croire que oui !”
Malgré les risques - un coup mal placé pourrait entrainer une perte d’audition encore plus importante ou pire encore, une perte de la vue - l’appétit de Maude pour la boxe s’est rapidement développé et les entrainements au gymnase ne lui ont vite plus suffi. Maude voulait combattre. “Dès que j’ai commencé à frapper, j’ai ressenti un si grand bien ! Pourtant, je n’étais pas quelqu’un qui ressentait de la colère ou un besoin de frapper… Mais il faut croire que oui !”, dit-elle. Trois mois plus tard, elle participait à ses premiers championnats canadiens.
Objectif Rio de Janeiro JO 2016

Depuis, Maude est montée sur les rings de près d’une dizaine de pays incluant l’Argentine, l’Equateur, la Turquie, la Hongrie, l’Inde, les Etats-Unis et la France. Elle devait d’ailleurs se rendre en Chine l’été dernier afin d’affronter les meilleures boxeuses du monde lors des championnats mondiaux de boxe amateur féminine, mais un conflit avec son employeur l’en a empêchée.

Comme d’autres athlètes amateurs de haut niveau, Maude doit financer elle-même la majeure partie des dépenses occasionnées par son sport. Qu’à cela ne tienne ! D’abord « arpenteure » sur les chantiers de construction et aujourd’hui factrice, la jeune athlète jongle quotidiennement entre sa vie professionnelle et sa passion. “C’est vrai que les boxeurs trouvent plus de budget. Je ne vois pas ça comme de la discrimination, mais plutôt comme un sport en évolution”, explique-t-elle sereinement.

Grâce à un nouveau commanditaire privé, Maude a récemment pu souffler un peu. Les prochaines années s’annoncent d’ailleurs très mouvementées. Avec l’entrée de la boxe féminine aux Jeux Olympiques de Londres cet été, la pugiliste pourrait avoir la chance de relever un nouveau défi avant de se lancer dans une carrière de boxeuse professionnelle, celui des JO de 2016 !