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#Memepaspeur : au Fespaco, les actrices et cinéastes africaines brisent le silence pour dénoncer les abus sexuels

Le 26e Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco), qui s'est achevé samedi avec la proclamation des prix, a été marqué par la révélation d'abus sexuels contre les femmes dans le cinéma africain.

#Memepaspeur : voici donc qu'à leur tour, un an et demi après que le #MeeToo a fait trembler Hollywood, les actrices du continent africain, elles aussi, prennent la parole pour dénoncer les abus sexuels dans le milieu du cinéma. 

#Memepaspeur, le #Metoo du cinéma africain

Le festival a été marqué par des révélations d'abus sexuels contre les femmes dans le monde du cinéma africain, touchant aussi bien les actrices que les réalisatrices et les techniciennes.

A l'origine de ces révélations : deux actrices, la Française Nadège Beausson-Diagne et la Burkinabé Azata Soro. Toutes deux ont accusé des cinéastes africains de harcèlement sexuel et d'agressions.

Nadège Beausson-Diagne aura attendu dix-huit ans avant de réussir à s’exprimer. Elle a finalement réussi à briser le silence lors d’une table ronde sur « La place des femmes dans l’industrie du cinéma africain et de la diaspora », organisée mercredi 27 février au Marché international du cinéma et de la télévision africains (Mica).

Elle raconte alors comment un réalisateur africain l’a harcelée, puis tenté de la violer. "Il m’a isolée de l’équipe technique, a interdit à tout le monde de me parler, a coupé certaines de mes scènes au montage, a menacé de bloquer mes billets d’avion… Je le soupçonne même d’avoir cherché à m’intoxiquer. Et ce réalisateur, qui n’a jamais été inquiété, est actuellement présent sur le festival", confie-t-elle devant la presse.
 

Dans son sillage, plusieurs autres femmes ont pris la parole, comme la réalisatrice Mariette Monpierre : "On m’a dit plusieurs fois dans ma carrière : “Si tu veux le boulot, il faut que tu couches…"

Azata Soro, deuxième assistante du réalisateur burkinabé Tahirou Tasséré Ouédraogo, est ensuite venue s’exprimer personnellement sur les violences qu’elle a subies. Les faits se sont produits lors du tournage de la série Le Trône. Après un différend, le réalisateur l’a insultée, frappée puis a cassé une bouteille de bière avant de taillader son visage. Une longue cicatrice de plusieurs centimètres reste encore aujourd'hui visible sur la joue d'Azata Soro.

Pétition en ligne contre Le Trône

Deux collectifs de femmes, "Cinéastes non-alignées" et "Noire n'est pas mon métier", ont lancé un mouvement, #Memepaspeur, pour "libérer la parole des femmes" en Afrique, espérant encourager d'autres femmes à témoigner.

Une pétition en ligne a été lancée pour exclure de la compétition la série Le Trône du cinéaste burkinabé Tahirou Tasséré Ouedraogo qui, lors du tournage en 2017, a lacéré le visage d'Azata Soro avec un tesson de bouteille.

La chaîne internationale francophone TV5 Monde, qui avait préacheté la série, annonce ce samedi dans un communiqué qu'elle ne la diffusera pas, et qu'elle met fin à toute collaboration avec Tahirou Tasséré Ouedraogo (frère du célèbre cinéaste Idrissa Ouedraogo décédé en 2018). "La chaîne se réserve le droit de le poursuivre en justice pour réparation des préjudices causés", annonce-t-elle dans un communiqué.
 

Le festival s'est tenu sous sécurité maximum, en raison du risque d'attentat, le Burkina Faso étant depuis quatre ans la cible de groupes jihadistes perpétrant des attaques de plus en plus fréquentes et meurtrières, y compris au coeur de Ouagadougou. Aucun incident ne s'est produit jusqu'à présent dans la capitale burkinabé, mais une patrouille de gendarmerie a été attaquée jeudi dans le nord du pays et un policier a été blessé dans une attaque lundi.

Au total, 165 films de 16 pays africains ont été présentés au Fespaco dans les différentes sections, longs métrages, courts métrages, documentaires, séries télé, films d'animation, ainsi que films d'écoles africaines de cinéma. Pour fêter le cinquantenaire du festival, des rétrospectives des classiques du cinéma africain et des films lauréats de l'Etalon d'Or ont été diffusées au cours de séances ambulantes dans les quartiers populaires.