Fil d'Ariane
Sa nomination entre dans l’histoire. Misty Copeland, a été promue danseuse étoile de l’American Ballet Theatre à New York, mardi 30 juin. L’accession à ce titre si prestigieux marque toujours un événement pour le monde de la danse. Mais cette promotion restera plus particulière que les autres parce que Misty Copeland, 32 ans, devient la première étoile noire des Etats-Unis. Tout un symbole dans une Amérique où les multiples violences policières contre des citoyens noirs - comme à Charleston - ont soulevé la colère d’une partie du pays qui se débat encore avec son héritage esclavagiste et ségrégationniste.
Voir une femme, noire, rejoindre l’élite de la danse (seulement) en 2015 soulève un vent d’enthousiasme mais montre aussi le long chemin parcouru pour arriver à ce niveau, dans un milieu artistique toujours très blanc. Avant Misty Copeland, le seul danseur étoile noir de l’American Ballet Theatre avait été nommé en 1997, vingt et un ans après le premier danseur étoile noir américain : Arthur Mitchell, choisi par le New York City Ballet en 1956.
C’est dans cette même ville multiculturelle de la côte Est qu’Alvin Ailey créé en 1958 sa propre compagnie dans laquelle il réunit de jeunes noirs-américains pratiquant la danse contemporaine et qui sont, à cette époque, souvent exclus d’autres ballets. Sur les scènes du monde entier, le Alvin Ailey Ballet célèbre encore aujourd'hui la culture afro-américaine.
Le parcours était donc laborieux jusqu’à la promotion de Misty Copeland qui fait partie de la troupe de l’American Ballet Theatre depuis 2000 et pour laquelle elle danse en solo depuis huit ans. Sa nomination a suscité un afflux de félicitations sur les réseaux sociaux sur lesquels la danseuse - très suivie sur Twitter (plus de 63 00 abonnés) et Instagram (plus de 600 000 abonnés) - a d’ailleurs posté sa nomination :
Une vidéo publiée par Misty Copeland (@mistyonpointe) le 30 Juin 2015 à 10h19 PDT
Une photo publiée par Misty Copeland (@mistyonpointe) le 23 Juin 2015 à 15h06 PDT
Dernière marche avant les étoiles. Cette réussite tant saluée et médiatisée couronne un parcours hors du commun. Alors qu’elle vit modestement dans un motel en Californie avec sa mère et ses cinq frères et soeurs, Misty Copeland commence la danse à 13 ans. « Trop tard », lui diront certains. « Pas le bon physique », pas les bonnes formes, lui répondront d’autres, pour parler, peut-être en réalité de sa couleur de peau.
Mais à 15 ans, elle remporte son premier concours et s’ouvre les portes de la réussite… Du rêve américain comme les Etats-Unis aiment tant le raconter. « J'ai eu des moments de doute, des moments où j'ai voulu tout arrêter, parce que je ne savais pas s'il y aurait un avenir pour une Afro-américaine à ce niveau, a-t-elle déclaré lors d’une conférence de presse, mardi 30 juin, après l’obtention de son titre. En même temps, cela m’a donné tellement l’envie d’aller jusqu’au bout. »
Et depuis quelques années tout s’est emballé, notamment depuis la diffusion d’une publicité d’une marque de vêtements de sport la mettant en scène et qui a été vue par plus de 8 millions de personnes.
Elle a également fait la Une du magazine américain Time qui l’a choisie parmi ses personnalités les plus influentes de l’année.
Elle a écrit son autobiographie Life in Motion: An Unlikely Ballerina (La vie en mouvement : une ballerine inattendue), classé parmi les meilleures ventes et qui pourrait être adaptée en film. Misty Copeland a également publié un livre pour enfant intitulé Firebird. Un documentaire a été réalisé sur elle et présenté au fameux festival du film de Tribeca à New York. La chaîne américaine CBS lui a aussi consacré tout un magazine 60 minutes.
Avec cette exposition médiatique croissante et la reconnaissance désormais de ses pairs, Misty Copeland n'oublie jamais d'user de cette nouvelle tribune pour appeler à une plus grande diversité dans la danse.
Elle compte bien incarner encore un exemple pour que tous les enfants qui font leurs premiers pas en chaussons voient en elle « un rêve » à leur portée.