Fil d'Ariane
"Le voile obligatoire n'existe pas dans la Constitution iranienne. Une partie des femmes qui ont voté il y a 40 ans pour cette Constitution étaient non voilées. À l'époque, le voile n'était pas obligatoire. Si le code pénal islamique oblige au port du voile, cela va à l'encontre de la liberté de l'individu, donc ce n'est pas légal," déclarait Nasrin Sotoudeh. En mars 2018, c'est en ces termes qu'elle se confiait à une journaliste de France Inter qu'elle recevait dans son bureau à Téhéran - elle ne savait pas à ce moment-là qu'elle allait bientôt être arrêtée et emprisonnée.
Le 17 mars 2020, l'avocate entamait une nouvelle grève de la faim. Une information relayée par Anton Struve, 34 ans, juriste parisien, qui défend au quotidien sur les réseaux sociaux le combat des Iraniennes pour leurs droits.
L’avocate Nasrin Sotoudeh, condamnée à 33 ans de prison et 148 coups de fouet pour avoir défendu les iraniennes qui luttent contre le voile obligatoire, entame une nouvelle grève de la faim pour la libération des prisonniers politiques en raison de la propagation du #COVIDー19. pic.twitter.com/eXgm7qhkwJ
— Anton Struve (@AntonStruve) March 16, 2020
Début novembre, la libération temporaire de Nasrin Sotoudeh, "relâchée de façon temporaire avec l’aval du procureur chargé des prisons des femmes", est saluée par tous ceux, nombreux, qui l'ont soutenue.
Premières images de Nasrin Sotoudeh à sa sortie de prison.
— Anton Struve (@AntonStruve) November 8, 2020
Une libération temporaire pour raison médicale.
Le 18 septembre, Nasrin Sotoudeh, avocate des iraniennes en lutte contre le voile obligatoire, avait été hospitalisée après 45 jours de grève de la faim. pic.twitter.com/rFKMNp2UwT
Top story: @Avocats_Paris: 'Aujourd'hui le conseil de l'Ordre et le @batonnierparis, en présence d'@Fontainehlne2, ont pu entendre le message que #NasrinSotoudeh a tenu à faire parvenir aux #avocats du barreau de Paris … pic.twitter.com/7pQZyUH9Y1, see more https://t.co/tL6wu4lYKd
— Komi NOMENYO (@Avocatweb2) November 10, 2020
Quelques jours après sa sortie de prison, Nasrin Sotoudeh est testée positive au Covid-19. Quelques semaines plus tard, elle est reconduite en prison :
Après une libération «provisoire» le 26 octobre pour raison de santé, Nasrin Sotoudeh, cette avocate iranienne des droits humains vient d’être reconduite en prison.
— Amnesty France (@amnestyfrance) December 4, 2020
Nous devons nous battre pour que Nasrin soit enfin libérée ! Agissez avec noushttps://t.co/A72yV4adBH
Alors qu'elle purge déjà une peine de cinq ans de prison, l’avocate et militante féministe iranienne Nasrin Sotoudeh écope, le 11 mars 2019, de 33 ans supplémentaires et de 148 coups de fouets. C'est ce qui lui en coûte de se battre pour les droits des femmes en Iran et de protester contre les lois sur le port obligatoire du hijab.
"C’est une condamnation à mort envers cette incroyable militante. Malheureusement, elle succombera avant le 148eme coup de fouet…" écrit une internaute sur Twitter. Sur les réseaux sociaux, les internautes expriment leur colère via le mot dièse #FreeNasrin, en Iran, mais aussi en Europe et aux Etats-Unis. "L’horreur de la peine révèle à quel point Nasrin Sotoudeh fait peur aux illuminés du régime. Nous devons exiger sa libération, sans compromis", écrit un autre. "Le système judiciaire iranien est devenu une source systématique d’injustice, de violence et d’insécurité", peut-on également lire.
Nasrin Sotoudeh is a national treasure in #Iran.
— Ashraf اشراف (@ASJBaloch) April 29, 2019
Why? Because she has bravely stood up for women’s rights. For children’s rights. For a safer, fairer Iran. Yet, for this, she is serving 38 years in prison & will be flogged 148 times. #FreeNasrin now.pic.twitter.com/sYl9D67NhS
"Pourquoi ? Parce qu’elle a bravement défendu les droits des femmes. Les droits des enfants. Un Iran plus sûr et plus juste. Pourtant, pour cela, elle purge une peine de prison de 38 ans et sera flagellée 148 fois. #FreeNasrin maintenant", dit encore cet autre internaute.
Depuis l'annonce de cette condamnation, la pétition lancée par Amnesty International a recueilli plus de 1,5 million de signatures à travers le monde pour exiger sa libération. En France, l'organisation a même lancé une "action coup de poing" pour saturer la boîte e-mail de l’ambassade d’Iran à Paris. "Vous êtes plus de 22 000 personnes à avoir envoyé un email demandant la libération de Nasrin !", lit-on dans un communiqué publié mi-avril.
148 coups de fouet, 33 ans de prison.
— Amnesty France (@amnestyfrance) 13 avril 2019
Son "crime" ? Avoir milité contre le port du voile obligatoire en Iran et avoir défendu les droits des femmes.
Aidez-nous à faire du bruit pour cette pétition ! https://t.co/FbPdnYiI5q
Dès l'annonce du jugement au mois de mars, Amnesty International demande que l’accusée soit "libérée immédiatement... Il est scandaleux que les autorités iraniennes la punissent pour son travail en faveur des droits humains. Sa condamnation renforce la réputation de l’Iran en tant qu’oppresseur cruel des droits de la femme", peut-on lire dans le communiqué.
L’ONG rappelle également l’article 134 du Code pénal iranien qui autorise les juges à infliger une peine plus élevée que celle prévue par la loi lorsque l’accusé fait l’objet de plus de trois chefs d’accusation. "Ici, le juge Mohammad Moghiseh a infligé 4 années supplémentaires à la peine totale de prison, la faisant passer du maximum statutaire de 29 à 33 ans", déplore-t-elle.
"Les femmes et les filles en Iran ne sont pas autorisées à sortir de chez elles sans se couvrir les cheveux d'un foulard et les bras et les jambes de vêtements amples. Nasrin voulait que cela change et elle a été emprisonnée pour cela, ajoute l'organisation. C’est la peine la plus sévère à l’encontre d’un défenseur des droits de l’homme en Iran ces dernières années, ce qui suggère que les autorités renforcent leur répression. Ces peines maintiennent Nasrin séparée de son mari et de ses deux enfants et l’empêchent de pouvoir mener à bien son important travail d’avocate spécialiste des droits humains", poursuit l’organisme de défense des Droits humains.
L’Union européenne a également dénoncé cette peine de prison et demandé "un réexamen immédiat de la sentence... Nasrin Sotoudeh a été condamnée à l’issue d’un procès par contumace qui a également mis en cause un certain nombre d’autres violations du droit à une procédure régulière, déplorait la porte-parole de la cheffe de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, au moment de l'annonce de cette condamnation. Nous attendons de l’Iran que le droit de Reza Khandan et Nasrin Sotoudeh de faire appel de leur condamnation soit respecté".
@MaryamMonsef https://t.co/XRSsFnZb97•Nous demandons au #G7 d’user de son poids économique et diplomatique pour libérer Nasrin (#FreeNasrin) et mettre fin à la répression des femmes dans le monde entier! #stopthecrackdownonwomen https://t.co/X6hvabGCYo
— MarieFranceLamoureux (@MFLamoureux) April 28, 2019
L'avocate était dans le viseur de la justice iranienne depuis des années. Elle est notamment connue pour son soutien envers les femmes qui manifestent contre le port du voile obligatoire dans son pays. Ce mouvement de contestation, né en 2014, prend de l’ampleur ces derniers mois, notamment sur les réseaux sociaux. Une trentaine d’arrestations ont eu lieu jusqu’à présent.
L'activiste iranienne, âgée de 55 ans, purge déjà une peine de 5 ans depuis juin 2018 dans la prison d'Evin à Téhéran. Nasrin Sotoudeh est poursuivie pour sept chefs d’accusation, dont "divulgation d’informations dirigées contre l’Etat, espionnage et apparition devant l’autorité judiciaire sans hijab islamique", comme le rapporte son avocat en décembre dernier. Dès lors, elle décide de ne pas se faire représenter au tribunal car la procédure en cours ne réunit pas, selon elle, les conditions d'un "procès équitable". Son mari a également été condamné à 6 ans de prison pour "complot contre la sécurité nationale" en janvier dernier.
Célèbre figure du militantisme pour la défense des libertés, l’avocate originaire de Téhéran s’oppose aux autorités iraniennes depuis plus de dix ans. A la suite du mouvement de contestation des élections de 2009, Nasrin Sodouteh avait défendu des activistes et des prisonniers condamnés à la peine de mort pour des infractions commises lorsqu’ils étaient mineurs.
En 2011, elle avait été condamnée à 11 ans de prison pour "diffusion de propagande et conspiration mettant en danger la sécurité de l’Etat". Cette peine avait été assortie d’une interdiction de pratiquer sa profession. Suite à cela, celle qui est aussi mère de deux enfants avait entamé plusieurs grèves de la faim pour protester contre la pression pesant sur sa famille. A cette époque, Amnesty International avait demandé sa libération immédiate. Nasrin Sodouteh avait été graciée deux ans plus tard.
Nazanin accepted @PENCanada ‘s One Humanity award on behalf of imprisoned Iranian lawyer Nasrin Sotoudeh. Her efforts to defend women & children on death row inside Iran led to the regime sentencing her for 38 yrs in jail & 143 lashes. pic.twitter.com/nXMVOQiQog
— Peter MacKay (@PeterMacKay) April 24, 2019
En 2012, le Parlement européen lui décerne le Prix Sakharov pour la "liberté de l’esprit". En 2018, elle reçoit le Prix international des droits de l’homme Ludovic-Trarieux. Le 11 avril 2019, on lui décerne le prix One Humanity lors du gala annuel de PEN Canada à Toronto. C'est l'activiste irano-canadienne Nazanin Afshin-Jam MacKay qui la représente pour recevoir ce prix, remis par l'icône littéraire canadienne Margaret Atwood.
"La persécution contre cette femme courageuse qui aide les femmes à obtenir un traitement équitable doit cesser immédiatement", déclare depuis la tribune de la cérémonie l'autrice, entre autres, du roman à succès adapté en série à la télévision La Servante écarlate.
A powerful show of solidarity outside the Iranian embassy in #London to support and call for the release all women prosecuted for protesting against the compulsory veiling laws and those unjustly jailed. #FreeNasrin #FreeNazanin #Iran#HumanRights @monaeltahawy @amnesty pic.twitter.com/fODFp8nuEg
— Khaled (@khaledawad74) April 26, 2019
Au-delà des nombreux soutiens officiels se met en place une véritable chaîne de solidarité dans les rangs des avocat.e.s. Dès le 12 mars, le barreau de Paris fait de Nasrin Sotoudeh sa "membre d'honneur" : "Il faut qu'elle sache qu'ici, on ne la laisse pas tomber" déclare Basile Ader, vice-bâtonnier de Paris. C'est une avocate, et c'est parce qu'elle a fait son métier d'avocate, qu'elle est ainsi traitée, s'indigne-t-il sur France Info. C'est la négation de l'existence de la défense". D'autres barreaux ailleurs en France rejoignent le mouvement en organisant des campagnes d'affichage et des rassemblements.
#NasrinSotoudeh : la mobilisation continue. Aujourd’hui ce sont les élèves avocats de l’@efbparis qui signent le mur de soutien à Nasrin. #OnNeLacheRien #FreeNasrin #Iran@batonnierparis @BasileAder @ProtectLawyers pic.twitter.com/Z5tdRqMrOd
— Avocats de Paris (@Avocats_Paris) April 26, 2019
Le 11 avril dernier, les avocats parisiens organisent une conférence, en présence de Shirin Ebadi, avocate et juge iranienne, prix Nobel de la paix 2003. A cette occasion, Marie-Aimée Peyron, bâtonnier de l’Ordre des avocats de Paris a tenu à rappeler les principes de base relatifs au rôle du barreau des Nations unies (1990), selon lesquels les pouvoirs publics doivent veiller "à ce que les avocats puissent s'acquitter de toutes leurs fonctions professionnelles sans entrave, intimidation, harcèlement ni ingérence indue, puissent voyager et consulter leurs clients librement, dans le pays comme à l'étranger (...) ne fassent pas l'objet, ni ne soient menacés de poursuites ou de sanctions économiques ou autres pour toutes mesures prises conformément à leurs obligations et normes professionnelles reconnues et à leur déontologie". Le vice-batonnier a ensuite lu une lettre que Nasrin Sotoudeh a écrite depuis sa cellule et transmise par son mari, Reza Khandan.
"Veuillez recevoir mes chaleureuses salutations depuis la prison d’Evin. La bonne nouvelle de vos efforts marqués d’amour et de bienveillance me remplit de joie et de surprise. Ma surprise vient du fait que je ne fais que mon devoir", écrit-elle.
Elle souhaite aussi adresser ces quelques mots à certains de ses compatriotes qui "profitent de leur liberté de parole pour dire que, dans le contexte actuel, la question de la liberté de se vêtir n’est pas le sujet le plus important à aborder. Toutefois, tout en respectant leurs avis, en les soutenant dans l’exercice de leurs droits et en respectant leur humanité, je souhaite leur dire que la liberté de se vêtir pour les femmes fait partie des libertés fondamentales et que le développement de la démocratie dans la société est conditionné au développement des droits des femmes. Tant que ce droit de se vêtir librement n’est pas assuré, les autres droits ne seront pas respectés".
#FreeNasrin #LibertepourNasrin
Lire sur la GBD la lettre de #NasrinSotoudeh au barreau de Paris & le compte-rendu détaillé de la conférence exceptionnelle en présence de Shirin Ebadi, prix Nobel de la paix 2003 #freenasrin @Avocats_Paris @ProtectLawyers @batonnierparis @BasileAder https://t.co/7oxT9Wdt0h pic.twitter.com/0U1W3MM4Xj
— La GBD (@LaGBD1) April 17, 2019