#NousToutes : deuxième grande marche contre les violences faites aux femmes

Pour la deuxième année consécutive, le collectif féministe #NousToutes invite toutes et tous à participer à la marche contre les violences sexistes et sexuelles. Cette année, à Paris, la marche menée par les familles des victimes et des personnalités comme Vincent Trintignant, Muriel Robin, Julie Gayet, Christiane Taubira... est parti de l'Opéra pour la place de la Nation - avec Terriennes.

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Anaïs Furtade
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Il y a un an, des dizaines de milliers de femmes et d'hommes descendaient dans la rue pour manifester leur colère face aux violences faites aux femmes. Des milliers de personnes sont encore attendues ce 23 novembre à Paris pour dénoncer les violences sexistes et sexuelles, ainsi que les trop nombreux féminicides recensés depuis le début de l'année. Le collectif #NousToutes espère ainsi mobiliser le gouvernement à deux jours de la fin du "Grenelle" des violences conjugales.

Départ à 14 heures de la place de l'Opéra en direction de la place de la Nation, à Paris, où des prises de paroles sont prévues, ainsi que de la musique. Le cortège sera ouvert par des familles de victimes de féminicides. Foulards violets - éternelle couleur de ralliement des suffragettes et des féministes - panneaux et slogans seront préparés par le collectif, qui encourage à relayer l'appel sur FacebookInstagram et Twitter

De nouveaux enjeux

La manifestation de ce 23 novembre tient compte de nouveaux enjeux, à commencer par celui de la non-mixité. Des espaces consacrés aux femmes sont prévus, à leur demande, pour les victimes de violences sexistes et sexuelles qui ne se sentent pas en sécurité dans des environnements de promiscuité avec des inconnus. Pour qu'elles puissent s’exprimer librement et participer présentes sereinement à la marche.

Personne pour garder les enfants ? Peur de venir toute seule à une manifestation à 16 ans ? Le collectif tente de proposer des solutions pour aider et encourager toutes celles et ceux qui auraient des difficultés à rejoindre la marche  : 

 
Depuis quelques semaines déjà, cette mobilisation contre les violences sexuelles et les féminicides s'affiche sur les murs de Paris. TV5Monde est allé à leur rencontre :

Des actions sont également prévues en régions, comme le montre cette carte de France :

carte manif 23
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En Île-de-France, 70 départs groupés sont prévus, et pour chacun a été créé un groupe WhatsApp :

Pour Anaïs Leleux, membre du collectif #NousToutes, l'objectif est d'être "un maximum dans la rue pour mettre la pression sur le gouvernement". A deux jours de la Journée internationale pour l'élimination des violences faites aux femmes et des annonces conclusives du "Grenelle" promises par le gouvernement, il s'agit aussi de sensibiliser l'opinion publique contre ce fléau.

La marche contre les violences faites aux femmes a lieu à l'avant-veille du 25 novembre 
Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes des Nations unies

Il y a un an tout juste, à la veille du 25 novembre, près de 50 000 personnes s'étaient rassemblées dans toute la France à l'appel de ce collectif citoyen. Cette année,
près de 70 organisations, partis politiques, syndicats et associations (Planning familial, CGT, CFDT, EELV, LFI, PS, Unef, PCF, SOS homophobie...) et plusieurs personnalités, dont les comédiennes Muriel Robin, Julie Gayet ou Virginie Efira ont appelé à rejoindre le défilé. Dans les lycées et les universités, une centaine de groupes de jeunes se sont également constitués pour y participer.


En tête de cortège, l'Union nationale des familles de féminicide (UNFF) défilera pour "dénoncer le mépris que l'Etat oppose aux familles", annonce sa présidente Sandrine Bouchait. En 2018, 121 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-compagnon, selon le ministère de l'Intérieur. Pour 2019, ce chiffre est à ce jour de 137 recensés depuis le 1er janvier 2019 sur la page Facebook Féminicides par compagnons ou ex et d'au moins 115 selon un décompte et une étude au cas par cas menée par l'AFP

Chaque année, quelque 220 000 femmes subissent des violences sexistes ou sexuelles en France, dont 93 000 sont victimes de viol ou tentative de viol. Pressé de toute part d'agir pour faire baisser ces chiffres, le gouvernement a lancé début septembre un "Grenelle des violences conjugales", promettant des mesures concrètes le 25 novembre après avoir associé des acteurs de terrain. Améliorer le recueil des plaintes des femmes victimes de violences, désarmer les compagnons violents à la première menace, faciliter le signalement des faits par les médecins... Une soixantaine de propositions issues des groupes de travail constitués pour ce Grenelle ont été remises fin octobre à la secrétaire d'Etat chargée de l'Egalité, Marlène Schiappa, qui devra trancher.
 


#MeToo a été un accélérateur incroyable et la société évolue à toute vitesse sur ces questions. Or les politiques publiques ne suivent pas
Caroline de Haas

"Le 25 novembre, on attend l'annonce d'un projet d'ampleur, ambitieux pour prévenir les violences, protéger les victimes et sanctionner les auteurs", déclare Fatima Benomar lors d'une conférence de presse du collectif #Noustoutes. "#MeToo a été un accélérateur incroyable d'un changement social sur le sujet des violences, la société évolue à toute vitesse sur ces questions. Or les politiques publiques ne suivent pas", poursuit Caroline De Haas, qui demande "un milliard d'euros supplémentaires".

361,5 millions par an, vraiment ?

Selon des données fournies par le cabinet de Marlène Schiappa, le budget consacré à la lutte contre les violences faites aux femmes est de 361,5 millions d'euros annuels. Un chiffre à prendre avec des pincettes selon Caroline de Haas qui a disséqué le document dans lequel la secrétaire d'Etat chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations présente le détail de ces 361,5 millions d’euros "supplémentaires" mobilisés contre les violences. Un document qui a été transmis aux journalistes mi-octobre 2019.

"La vérité c'est que nous dépensons plus d'un milliard d'euros par an" pour cette cause, affirmait ce 21 novembre sur France Inter le Premier ministre, Edouard Philippe, assurant qu'"on dépense plus en France qu'en Espagne", pays souvent cité en exemple, une affirmation qui a fait grincer des dents les associations féministes : 

Pour #NousToutes, certaines mesures sont "indispensables et urgentes" : l'instauration d'un brevet de la non-violence obligatoire pour tous les collégiens, une plus large utilisation de l'ordonnance de protection, la formation de tous les professionnels au contact des victimes, et la mise en place de tribunaux dédiés pour juger ces faits plus rapidement.


Le Premier ministre Edouard Philippe devrait être présent lundi pour conclure le Grenelle. "Insuffisant", pour le collectif qui demande "une réelle implication" d'Emmanuel Macron. "Si ce n'est pas le président qui fait la restitution du Grenelle, je me demande quel est le message qui est envoyé aux victimes et aux familles", note Caroline De Haas.
 

La violence à l'égard des femmes en chiffres
 
  • 35 % des femmes dans le monde ont subi des violences physiques et/ou sexuelles de la part d'un partenaire intime ou des violences sexuelles de la part d'une autre personne à un moment donné dans leur vie. 
  • Selon les études menées à l'échelle nationale, jusqu'à 7 femmes sur 10 ont été victimes de violences physiques et/ou sexuelles de la part d'un partenaire intime au cours de leur vie.
  • Chaque jour, en moyenne dans le monde, 137 femmes sont tuées par un proche, dont plus d'un tiers (environ 30 000 au total) par un conjoint ou ex-conjoint (On estime qu'environ 87 000 femmes dans le monde ont été intentionnellement tuées en 2017, dont plus de la moitié (58%) par leur conjoint ou des membres de leur famille).
  • Moins de 40 % des femmes victimes de violences demandent de l'aide sous une forme ou une autre. Moins de 10 % des femmes victimes de violence qui ont demandé de l'aide font appel à la police (la plupart se tournent vers leur famille ou leurs amis et très peu ont recours à des institutions ou dispositifs organisés, tels que les services de santé ou les forces de police.)​

    En France :
  • 47 % des décès liés aux violences conjugales sont survenus au sein de couples mariés, contre 22 % au sein de couples en concubinage. 
  • En 2018, près de 32 % des féminicides ont été commis par arme à feu et 31 % avec une arme blanche.
(Estimations d'ONU Femmes)

#NousToutes avec les Suissesses

En Suisse, l’initiative lancée par #NousToutes en 2018 avait trouvé un large écho à Genève et à Lausanne, relate notre partenaire suisse Le Temps. Anne-Claire Adet, codirectrice du festival Les Créatives, était elle-même l’une des signataires de la tribune. Ce samedi à Lausanne, un rassemblement aura lieu place de la Riponne. "Depuis trois ans, on assiste à une prise de conscience générale et internationale. Que ce soit en Espagne, contre les violences machistes, ou en Amérique du Sud, où les femmes se battent pour la légalisation de l’IVG", rappelle Maria Pedrosa, membre du collectif de la grève des femmes dans le canton de Vaud.

Il faut briser les silences individuels, collectifs et institutionnels.
Maria Pedrosa, membre du collectif de la grève des femmes 

"Le lien qui nous unit, c’est cette journée internationale. On se tient au courant de ce qu’on va faire. La France va surtout marcher contre la thématique qu’elle porte sur le féminicide. Ici, dans le canton de Vaud, l’idée est de visibiliser ces thématiques et cette violence très présente en Suisse. Il faut briser les silences individuels, collectifs et institutionnels."

En Belgique aussi

Selon le blog Stop Féminicide, créé par des associations féministes belges, au moins 21 femmes ont déjà été tuées en 2019 pour le simple fait qu’elles sont des femmes. Depuis 2017, année de création du blog, 99 féminicides ont été recensés en Belgique. Et pourtant, il n'exite aucun chiffre officiel sur la question...

Dimanche 24 novembre, la plateforme Mirabal, qui réunit une centaine d’organisations de la société civile, appelle à manifester à Bruxelles dans le cadre de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. Rendez-vous au carrefour de l’Europe, à la gare centrale de Bruxelles, à 14 heures, pour exiger une lutte plus efficace contre toutes les formes de violences affectant les femmes.