Octobre rose : le "dragon boat" comme thérapie post-cancer du sein

Pagayer pour se remettre d'un cancer du sein : c'est le parti pris par des milliers de femmes en rémission, qui veulent rebondir et prévenir les récidives en pratiquant le dragon boat. A l'occasion d'Octobre rose, un film revient sur l'histoire des pionnières de ce sport ancestral chinois qui renforce le haut du corps.

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Dragon boating Vancouver
Festival de dragon boating en juin 2022 à Vancouver, au Canada, pour la sensibilisation au cancer du sein (capture d'écran Facebook)
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Capture dragon boat
Capture d'écran de la bande anonce du film Dragon boat.
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Le 11 octobre 2022, la chaîne française M6 consacrait toute une soirée au phénomène du dragon boat, ce sport nautique proche de l'aviron conseillé après un cancer du sein pour réduire les risques de récidive. Une soirée inaugurée par le téléfilm Le Souffle du dragon, inspirée de l'histoire des premières pratiquantes françaises de cette activité physique à l'occasion d'"octobre rose", la campagne annuelle de sensibilisation à la maladie.

Un sujet lourd, un regard apaisant

Parler du cancer en première partie de soirée sur une chaîne nationale, "c'est un challenge et un tour de force", expliquait la réalisatrice Stéphanie Pillonca lors d'une conférence de presse. Le défi est d'"aborder des sujets lourds en essayant d'apaiser et de communiquer sans effrayer", développe la cinéaste qui a déjà traité sur le petit écran de la trisomie 21 (Apprendre à t'aimer, J'irai au bout de mes rêves), du handicap (Handigang) et de l'adoption dans un documentaire (C'est toi que j'attendais).

Son parti pris cette fois a été de montrer comment des femmes traitées d'un cancer du sein se reconstruisent moralement et physiquement par le dragon boat, qui consiste à pagayer en équipe et à l'unisson sur une embarcation, proche de la pirogue, parfois ornée d'une tête de dragon. Pour les incarner, la réalisatrice s'est entourée d'actrices comme Julie de Bona, Julie Gayet, Bérengère Krief ou Firmine Richard.

La réalisarice s'est aussi entourée d'authentiques dragon ladies, comme Claire Fiaschi, présidente de "Ensemble, pour elles", premier équipage français de dragon boat créé fin 2008 à Reims. 

Associer cancer et mort, "c'est un raccourci dévastateur", estime Claire Fiaschi, également conseillère sur le téléfilm et protagoniste du documentaire Dragon Ladies : elles rament pour leur vie, consacré au parcours de dragons ladies.

Ramer contre le lymphoedème

Tout comme l'escrime, le dragon boat, en stimulant le drainage naturel du haut du corps, contribue à prévenir le lymphoedème du bras, un gonflement chronique de ce membre qui est une complication courante après un cancer du sein. "C’est la chirurgie axillaire, ou curage axillaire, consistant à retirer un ensemble de ganglions lymphatiques de l’aisselle, qui va créer des troubles de la circulation lymphatique du membre supérieur, et ainsi un œdème de lymphe du bras, puisque celle-ci est ralentie – voire bloquée – et s’accumule sous la peau, rappelle lassociation Dragon ladies Unies Pour Elles sur sa page Facebook.  

Le lymphœdème se caractérise par une augmentation du volume de la main et du bras, avec un délai et un mode d’apparition variables. Il survient dans 30% des cas après curage axillaire, mais des cas sont également rapportés après la technique des ganglions sentinelles. Quant à son apparition, elle peut être très variable dans le temps: généralement dans les 18 premiers mois, mais aussi 10, 20 ou 30 ans après.

Après un cancer : la vie

"Il y a encore beaucoup de décès mais il y a plus de survivants que de morts", en particulier parmi les personnes touchées par le cancer du sein, souligne Claire Fiaschi. Après le diagnostic, le taux de survie nette à cinq ans est de 87%, selon l'Institut national du cancer, qui a recensé en 2018 12 100 décès liés à cette maladie et 58 500 nouveaux cas.

La tête haute en dragon boat

"Il y a une vie après", soutient Claire Fiaschi, qui a trouvé dans le dragon boat "une grande famille", où l'on accueille "sans aucun jugement" et sans obligation de performance. Le dragon boat "nous oblige à nous redresser, ajoute-t-elle, parce que souvent quand vous êtes opérée, pour peu qu'on vous ait enlevé le sein, vous vous repliez sur vous-même".

Après le cancer,on a l'impression qu'on est une demi personne : un pied vers la mort, l'autre vers la vie.
Carole David, fondatrice des Dragons ladies de Paris 

Pour Carole David, créer en 2016 l'équipe des Dragons ladies de Paris via l'association "Phoenix & dragons", "ça a été ma résilience à moi", confie-t-elle. Alors en cure post-traitement, elle se fixe pour but de participer à la Vogalonga – une course annuelle d'une trentaine de kilomètres à Venise dédiée aux embarcations à rame – après avoir vu ce défi sportif relevé dans le documentaire Nous irons à Venise par les dragons ladies rémoises.

Quelques mois plus tard, elle réussira son pari, accompagnée d'une dizaine de femmes et sous la houlette d'un coach qui, encore aujourd'hui, continue à les entraîner chaque samedi matin avec, pour "cerise sur le gâteau", la course annuelle à Venise au printemps. "L'idée ce n'est pas d'avoir une force ou forme physique particulière mais de se synchroniser avec les autres dans un souffle commun, explique Carole David.

"Après le cancer, la perte d'estime de soi est très importante, on a l'impression qu'on est une demi personne : un pied vers la mort, l'autre vers la vie" et avec cette activité nature, "les femmes retrouvent une belle énergie, on a l'impression de se retrouver en colo, c'est super agréable", sourit-elle.