Avec son discours très engagé lors des Golden Globes, Oprah Winfrey a créé un véritable sursaut sororal et est devenue, pour une partie de l'Amérique, la femme qui pourrait battre Trump à l’élection présidentielle de 2020. Selon deux proches, la célèbre productrice américaine « réfléchit sérieusement » à une candidature.
En 9 minutes, elle a enflammé la 75 ème cérémonie des Golden Globes. Dimanche dernier, tous les projecteurs étaient braqués sur la présentatrice, productrice et actrice qui recevait le prestigieux prix Cécil B. DeMille pour sa carrière. Première présentatrice afro-américaine à avoir percé à la télévision il y a 30 ans, cette icône adorée par les Américains a rappelé qu’elle est aussi la première femme noire à recevoir cette récompense après Sidney Poitier, premier homme afro-américain, en 1982.
Un discours émouvant et politique
Alors que les Golden Globes célébraient la lutte contre les violences faites aux femmes, la vedette de 63 ans s’est mise au diapason avec des déclarations aussi politiques que poignantes.
«
Ce soir, je veux exprimer ma gratitude envers toutes les femmes qui ont subi des années de maltraitance et d’agressions parce qu’elles devaient, comme ma mère, nourrir leurs enfants, payer leurs factures et vivre leurs rêves, s’est-elle émue.
Il y a des femmes dont on ne connaîtra jamais le nom. Il y a des employées de maison, des ouvrières agricoles. Elles travaillent dans des usines, dans des restaurants, elles sont universitaires, ingénieures, médecins, scientifiques. Elles font partie du monde de la technologie, de la politique ou des entreprises. Elles sont nos athlètes aux Jeux olympiques et nos soldats dans l’armée. »
Je veux que toutes les filles qui regardent ce soir sachent qu’un nouveau jour pointe à l’horizon !
Oprah Winfrey, présentatrice et femme d'affaire américaine
Elle a également soutenu les femmes qui ont eu le courage de dénoncer le harcèlement et les agressions sexuelles, rendu hommage à Rosa Parks et
Recy Taylor, violée par 6 hommes blancs, le 3 septembre 1944, et décédée il y a 10 jours. Tout en chargeant son discours de grands espoirs : «
Je veux que toutes les filles qui regardent ce soir sachent qu’un nouveau jour pointe à l’horizon ! » a-t-elle conclu sous les applaudissements d'un public au bord des larmes et debout.
Un réveil sororal
Chloé Delaume, auteure de la dystopie
Les sorcières de la République, voit dans ce discours un «
réveil sororal » indispensable «
si l’on veut réellement combattre la domination masculine ». Dans son livre, dont
on vous conseillait ardemment la lecture, elle avait justement reformulé la devise républicaine par «
liberté, égalité, sororité». Car, selon elle, cette sororité doit être «
la voie » et être au coeur de la quatrième vague du féminisme qui est à l'oeuvre.
Elle regrette d'ailleurs qu’au lendemain des déclarations salutaires d’Oprah Winfrey, en France, 100 femmes parmi lesquelles l’actrice Catherine Deneuve, signaient une tribune anti #Balancetonporc dans
Le Monde défendant « la liberté d’importuner » des hommes.
«
Cette tribune malheureuse traduit précisément le manque de sororité persistant dans l’Hexagone et qui empêche les femmes de briser le plafond de verre », souligne Chloé Delaume. Néanmoins, si l’auteure salue les propos de la milliardaire américaine, elle regrette que les Etats-Unis continuent après «
Reagan ou encore Donald Trump, de propulser à la présidence des personnes sans aucune expérience politique. »
Son manque d'expérience politique : un atout ?
Un argument largement invoqué mardi dans la presse américaine, plusieurs éditorialistes et détracteurs notamment côté Républicains, où Oprah Winfrey est moins populaire que dans le camp démocrate, ont pointé le défaut d’expérience en politique de cette native du Mississipi, très célèbre pour avoir popularisé le talk show people.
Pour beaucoup, aux Etats-Unis, l’expérience politique est en réalité un handicap lors d’une élection, et non un atout.
Cindy Rosenthal, professeur de Science politique à l'université d'Oklahoma
Mais comme le souligne Cindy Rosenthal dans les colonnes de
Jeune Afrique, il ne faut pas «
considérer cela comme une plaisanterie, pas plus que Donald Trump candidat ». «
Pour beaucoup, aux Etats-Unis, poursuit-elle
, l’expérience politique est en réalité un handicap lors d’une élection, et non un atout.»
Interrogée par les médias américains juste après son discours, l'animatrice charismatique s’est, pour le moment, contentée d’affirmer «
qu’elle est heureuse d’être allée au bout de son discours. » Or, selon
CNN, deux proches anonymes auraient confié qu’Oprah Winfrey «
réfléchit sérieusement » à une candidature à l’élection de 2020.
Ce n’est pas la première fois que les spéculations autour d’une possible course à la présidentielle entoure la femme d’affaires, qui n’avait pas manqué d’afficher ses positions politiques en soutenant les candidatures démocrates de Barack Obama en 2008 et 2012 et juste après, celle d’Hillary Clinton. En juin dernier, cette self-made-woman avait cependant coupé court aux rumeurs dans l’émission The Late show de Stephen Colbert, en déclarant qu’elle ne se présenterait «
jamais à aucun mandat ».
Gagnante face à Trump selon un sondage
En mars 2016, un sondage la donnait gagnante face à Trump à 47 % contre 40 % pour le président sortant. L'actuel président américain, lui même, avait pensé à
la nommer vice-présidente. Aujourd'hui, il déclare «
qu'il battrait Oprah dans une course à la présidentielle », comme le rapporte
The Guardian.
Or, une vague de supporters anonymes et plusieurs célébrités continuent de manifester leur soutien sur Twitter à celle qui sera, peut-être, sa future adversaire en 2020. «
Oprah présidente ? Elle a ma voix », a de son côté tweeté la chanteuse Lady Gaga au lendemain des Golden Globes.
Suivez Lynda Zerouk sur Twitter :
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