Fil d'Ariane
Alors que le confinement débuté le 17 mars pour freiner la progression du coronavirus est prolongé au moins jusqu'au 15 avril, des religieuses livrent en video des suggestions afin de gérer au mieux cette situation inédite pour le grand public. Cloîtrées dans des monastères ou des couvents depuis des siècles, les servantes de Dieu nous font profiter de leur expérience.
"On a une petite expérience de ce qu'est le confinement", affirment-elles sans ironie. Depuis des siècles, certains ordres mènent une existence "cloîtrée", mais soumise à une stricte discipline, minutieusement rythmée et organisée. C'est le secret pour tenir dans la durée. "On s'aperçoit, avec ce temps de confinement, que notre vie monastique est d'une actualité impressionnante !", affirment les soeurs Anne, Diane et Béatrice, de l'Abbaye de Boulaur Sainte-Marie, dans le Gers. Pour habiter au mieux le temps confiné, ces cisterciennes nous prodiguent des conseils et gestion et d'organisation, principalement axés sur une division adéquate du temps et de l'espace. Elles les présentent dans une vidéo, filmée par le groupe des Jeunes catholiques de Lyon :
Le premier conseil, peut-être le plus important, consiste à "se fixer des horaires et à alterner, entre (...) travail manuel, intellectuel, moments de solitude (et) temps communs avec d'autres", soulignent les soeurs. Une méthode validée par Frère Luc, bénédictin à l'abbaye de Sainte-Marie de la Pierre qui vire, dans l'Yonne : "Nous avons de la chance car notre temps est d'abord structuré par les offices, avec sept temps de prières en 24 heures." S'ajoutent "des temps de travail (pour le magasin), les cours donnés, les tâches de la vie quotidienne (cuisine, linge...)". Une alternance "très fructueuse, entre activités et pauses, ainsi que temps de rencontre, et temps personnels", selon lui.
"Les monastères aussi sont bien organisés. C'est étudié, car on sait qu'on est là pour tout le temps", observent les religieuses. "Il y a des lieux pour la vie commune - le réfectoire, le chapitre - et des lieux privés comme la cellule. C'est structurant... Je conseillerais d'essayer de se préserver des espaces d'intimité et d'autres de vie commune. Et si on peut marcher quelque part, c'est toujours bien aussi... Le dimanche, on ne travaille pas, on n'est pas dans son bureau," suggèrent aussi les soeurs de l'Abbaye de Boulaur. Elles conseillent aussi, tout simplement, de "soigner son intérieur".
Beaucoup de gens nous disent désirer prendre un temps de retraite. Là, c'est l'occasion de la faire.
Soeur Anne
Dominique Poirel, directeur de recherche au CNRS et directeur de l'Institut d'études médiévales de l'Institut catholique de Paris le rappelle : "Chez les bénédictins, dans la journée, il y a la récréation. Des moments de causeries. Au chapitre, on peut régler les aspects de la vie en commun, c'est là qu'on peut se demander pardon entre frères quand il y a eu un différend". Pour Frère Luc aussi, "il faut des moments pour se détendre... Un dimanche soir, des frères plus jeunes avaient organisé un quizz musical, ils ont intitulé ça 'surprise contre la morosité', on a beaucoup ri".
"En Occident, depuis le VIe siècle, la principale règle du monachisme est celle de saint Benoît, qui donne naissance à l’ordre bénédictin. Une règle en quelque sorte fondée sur les 'trois huit' : la prière, l'étude et le travail manuel", confirme Dominique Poirel.
"Au fil des siècles, des réformes ont eu lieu au sein de la famille bénédictine, avec l'apparition d'ordres observant la règle parfois de manière encore plus austère, comme par exemple les cisterciens au XIIe siècle". Reste que "tous ont une journée très structurée" et connaissent "cette dialectique entre solitude et vie en commun".
Personne ne vous en voudra de ne pas prendre le voile, mais il serait dommage de ne pas s'inspirer des bonnes pratique de ces confiné.es volontaires.
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