Sylvie Coché sait de quoi elle parle.
Durant une trentaine d'années, cette ex-sage-femme a participé à des milliers d'accouchements. Si elle ne pratique plus aujourd'hui, préférant assurer des tâches d'encadrement médical, l'envie lui est venue de parler.
Avec Poussez, Madame ! (Les Editions de l'Opportun), Sylvie Coché passe à table.
Elle raconte son travail.
Sylvie Coché
Patiente submergée par le stress
A peine 3% des hommes exercent cette profession de sage-femme, comment l'explique-elle ? "Cela fait à peine une trentaine d'années que les hommes ont le droit de faire ces études-là. Avant, cela faisait partie d'un matriarcat et les choses étaient ainsi depuis l'histoire de l'humanité. Ce sont toujours des femmes qui ont aidé d'autres femmes à accoucher. Mais je travaille avec des hommes sages-femmes et je trouve qu'ils sont exceptionnels. Les femmes sont d'abord surprises de voir un homme en face, mais elles oublient très vite et sont rapidement conquises".

Sylvie Coché
Au fil des pages, le lecteur rebondit de suprises en suspenses. Comment oublier ce 25 décembre en bloc opératoire ? La patiente va accoucher. Sylvie lui explique l'immuable technique : "Inspirez à fond, bloquez la respiration et poussez le plus fort et le plus longtemps possible".
Mais rien ne se passe comme prévu.
La patiente, d'un élan formidable, projette tout à coup ses postillons au visage de l'accoucheur puis, se rendant compte de la situation, éclate de rire et déclenche un fou-rire général. Dans le bloc, voici toute l'équipe pliée en quatre ! L'hilarité est telle que Syvie remarque "qu'à chaque nouvel éclat de rire, on pouvait voir avancer la tête du bébé de quelques millimètres (...) Ce petit bonhomme de Noël est sorti par les seules poussées dues aux éclats de rire de sa maman ; elle n'a jamais eu besoin de se concentrer pour l'aider à sortir".
Autre "classique" dans son quotidien rarement morose : le rapport à la nourriture. Beaucoup de ces mamans nouvelles angoissent sur le poids de leur enfant. Sylvie Coché se souvient de cette maman qui pesait non pas son bébé, mais son sein ! "Elle m'explique alors qu'elle ne faisait qu'appliquer les consignes données par le pédiatre, peser avant et après la tétée !" écrit-elle.

Devine qui va sortir ?
On pourrait relever tant et tant d'anecdotes, le plus souvent légères, parfois tragiques, mais l'ouvrage offre aussi un constat saisissant de la réalité de ce métier où il n'est pas rare de vivre de vraies passes d'armes avec des chirurgiens caractériels, égoïstes ou mal lunés. Pour se venger du comportement grossier de l'un d'eux, elle n'hésite pas, un jour, à faire avaler à l'indélicat une fausse truffe en chocolat. La truffe en question était un suppositoire laxatif habillé de cacao !
Hitchcoquien.
Sylvie Coché tient à préciser que son métier "est d'abord celui d'une équipe avec les parents et tout le personnel du bloc opératoire". Avant de nous quitter, elle remarque la solitude des mamans, une fois le bébé arrivé. " La mère, pendant neuf mois, est le centre du monde. Dès que l'enfant paraît, il lui vole la vedette. C'est très net. Beaucoup estiment que la maman, une fois qu'elle a accouché, c'est bon, on n'en parle plus. Alors qu'elle a besoin d'être entourée, de réconfort..."
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