Elles viennent de partout, Madagascar, Philippines, Ethiopie, Côte d’ivoire… pour rejoindre leur « Madame » et leur « Monsieur » et élever les petits Libanais. Les employées de maison au Liban dépendent du système « kefala » qui fait de leurs patrons leurs tuteurs, dont elles peuvent difficilement se séparer en cas d’abus et de violences,
entrainant des morts chaque semaine, comme le montre un récent
rapport de l'ONG Human Rights Watch.
Rahel Zegeye en sait quelque chose. « J’ai eu une mauvaise « Madame » pendant six ans, j’ai beaucoup pleuré… », se remémore-t-elle. « Je préparais tout le temps mon sac pour la quitter, nous avons eu beaucoup de disputes car elle ne voulait pas me payer. Je manquais de nourriture et je n’avais même pas d’argent pour m’acheter une bouteille d’eau. Je la suppliais de me payer… ».
Surmonter les peurs
Lorsque Rahel se retrouve à la rue pendant la guerre de 2006, abandonnée par sa patronne, une amie de son église lui conseille de travailler pour un « Monsieur ». Mais l’idée de vivre chez un homme célibataire ne plaît pas à la jeune femme : « Pendant une semaine je n’ai pas dormi… J’avais peur. » Par chance, Pierre Koutoujian, son nouveau patron, la prend sous son aile. « Il est devenu comme mon père. Il a même rencontré ma famille en Ethiopie. Je me sentirais mal maintenant de le laisser », raconte-t-elle avec émotion.
Grâce au soutien de Pierre et de ses amies, Rahel se lance dans la réalisation d’un film
"Beirut" sur le sort des migrantes au Liban qu’elle autofinance et tourne pendant tous ses dimanches durant deux ans. Elle vient également d’écrire une pièce de théâtre sur la même thématique. Rahel, ravie, raconte : « Le gouvernement libanais m’a autorisée à jouer cette pièce et beaucoup de Libanais sont venu la voir, ça m’a vraiment fait plaisir. »