Fil d'Ariane
L’histoire commence en mars 2018, à Bamako, au Mali. La princesse Esther Kamatari y séjourne à l’invitation de Fadi Maïga, une jeune styliste qui promeut la mode malienne et l'artisanat local, notamment à travers le FESTIA qu'elle a créé, Festival d'Ici et d'Ailleurs. Un jour, au détour d'une conversation, Esther Kamatari apprend l’existence à Gao, dans l’est du pays, du Centre Niali - Niali signifie « la joie », en songhaï, l’une des nombreuses langues parlées au Mali.
Créée en 2007, cette association accueille des enfants et adolescents âgés de trois à dix-sept ans. La plupart du temps, ces derniers sont orphelins ou en situation d’exclusion. Ancien mannequin, devenue ambassadrice de la maison Guerlain, Esther Kamatari apprend aussi que quelques-unes des femmes qui prennent en charge ces enfants, tirent leurs revenus de petits métiers comme la broderie, la fabrication de bijoux ou encore de chapeaux en coton, ornés de cauris, de perles multicolores...
Touchée par cette histoire, Esther Kamatari incite son hôte à l’emmener à Gao. Malheureusement, dans cette cité fondée au VIIe siècle, comme dans de nombreuses autres villes maliennes, la situation sécuritaire reste aujourd’hui encore préoccupante. Dans son dernier rapport sur la situation au Mali, l’ONU affirme d’ailleurs que « 48 attaques à l’engin explosif improvisé, ont été enregistrées depuis septembre 2018. »
Nous vivons dans un monde où il y a beaucoup d'humanitaires, et dans ce monde, il manque un tout petit peu d'humanité.
Esther Kamatari
Une insécurité qui persiste donc, malgré la présence sur place des militaires français de l’opération Barkhane, ou encore de la MINUSMA, Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali. Mais quelques semaines plus tard, le vœu de la princesse Esther Kamatari se réalise finalement, grâce à la première Dame malienne, Keïta Aminata Maïga.
Au cours de leur séjour à Gao, début mai 2018, les deux femmes découvrent comment le Centre Niali permet à ces enfants issus de familles démunies, d’accéder à une éducation de qualité ou encore à des loisirs. Autre particularité de cette organisation, elle met tout en œuvre pour permettre aux populations locales, souvent confrontées à d’importantes difficultés socio-économiques, de continuer de s’autogérer comme elles le font depuis plusieurs générations. Un choix qui se traduit notamment par le développement des métiers de l’artisanat, comme ceux exercés par les femmes qui encadrentles enfants du Centre Niali – broderie, bijouterie, chapellerie…
En quittant Gao, Esther Kamatari promet d’y revenir, afin de contribuer au bien-être et à l’épanouissement de ces enfants. Une façon aussi de les remercier pour l’accueil chaleureux qu’ils lui avaient réservé. De retour à Paris, elle met en branle son réseau dans l’univers de la mode.
Très vite, elle réussi à fédérer des personnalités telles que le chef d’entreprise d'origine congolaise Trésor Elenguitor, la créatrice de mode et mannequin congolaise Assina Obela, le styliste camerounais Martial Tapolo, le joaillier ivoirien Kareem Fadika, la spécialiste du cheveu naturel Nadeen Mateky ou encore le photographe ghanéen Adrew Kumi.
On ne peut pas se laver le visage avec un doigt. Il faut au moins une main, de préférence les deux.
Esther Kamatari
Une idée s’impose alors : célébrer la beauté noire, à travers quelques-unes des grandes dames qui ont marqué l’histoire de l’Afrique et de ses diasporas. Aujourd’hui, la mise en commun de tous ces talents a conduit à la réalisation de très belles œuvres photographiques. Celles-ci permettent d’exhumer des tranches de vies exceptionnelles, comme celle de l’Angolaise Nzinga Mbande, qui a durablement marqué le 17e siècle.
Reine du Ndongo et du Matamba, deux royaumes voisins de l’empire Kongo, inclus dans l’actuelle Angola, Nzinga Mbande a su tenir tête aux Portugais et à leurs alliés. Véritable icône de l’histoire angolaise, elle est aussi l’une des figures du projet de l’UNESCO sur les « Femmes dans l’histoire de l’Afrique ».
Retournez-vous sur votre histoire et soyez fiers de vous, de votre couleur, de vos pays d'origine, de votre continent.
Esther Kamatari
Autre grande figure historique, devenue elle aussi une légende aux Antilles, la Mulâtresse Solitude. Née vers 1780, d’une mère esclave arrachée à l’Afrique, et d’un père marin sur des bateaux négriers européens, la Mulâtresse Solitude participe très activement aux rébellions de 1802, en Guadeloupe.
A l’époque, les rebelles, anciens esclaves pour la plupart, ont alors deux objectifs principaux : empêcher le retour sur l’île du baron Jean-Baptiste Raymond de Lacrosse, nommé capitaine-général de la Guadeloupe par Napoléon Bonaparte ; mais aussi, lutter contre le rétablissement de l’esclavage, aboli huit ans plus tôt, par la Convention.
Enceinte de quelques mois, Solitude rejoint malgré tout la lutte contre les troupes napoléoniennes. Après dix-huit jours d’un combat inégal, aux côtés de près d’un millier de compagnons d’infortune, Solitude est faite prisonnière le 23 mai 1802. A la fin de la même année, elle est condamnée à mort et suppliciée le lendemain de son accouchement.
L'exposition Black Queens, qui se tient le 23 janvier2019, à 19h, à la A2Z ART GELLERY (24, rue de l'Echaudé, 75 006 Paris), célèbre la beauté noire, grâce à de grandes figures de l'histoire africaine et de ses diasporas. L'occasion de (re)découvrir les reines, prophétesses, divinités et autres résistantes, souvent oubliées, en particulier par les jeunes générations. En plus de la reine Nzinga Mbande, et de la Mulâtresse Solitude, une dizaine d'autres personnages illustres sont représentés ici par des mannequins : Néfertiti, la prophétesse kongo Kimpa Mvita, la reine malgache Ranavalona III, l'esprit de l'eau Mami Wata...