Fil d'Ariane
Ahmès-Néfertari, Hatshepsout, Néfertiti, Néfertari, Isisnefert, Touy ( la mère de Ramsès II ), Tiyi ( la mère d’Akhénaton ), les noms de ces femmes continuent de résonner dans nos mémoires malgré les siècles qui passent. Plusieurs des artefacts présentés dans cette exposition leur ont appartenu personnellement et proviennent du Musée égyptien de Turin (Museo Egizio de Turin), qui possède la plus grande collection égyptienne après celle du Musée du Caire.
« La femme était bien plus libre et présente dans la civilisation égyptienne qu’elle ne l’a été dans la Grèce antique ou à Rome. La femme égyptienne pouvait boire, manger en public, transmettre son héritage. » explique Francine Lelièvre, directrice du Musée Pointe-à-Callière.
Elles n’hésitaient pas non plus à comploter contre les tenants du pouvoir pour les renverser : « Et là on ne parle pas seulement des reines, mais aussi des concubines, des maîtresses. Elles détenaient un pouvoir très fort de complot, d’attentat contre la vie du roi afin de mettre sur le trône leurs enfants. » rencherit Alessia Fassone, conservatrice, au musée Egizio de Turin.
La femme égyptienne pouvait divorcer, elle avait une égalité juridique avec les hommes, elle pouvait être propriétaire d’un domaine agricole, être prêtresse, etc. Et les mères des pharaons ou leurs grandes épouses royales avaient également un rôle actif dans la gestion du Royaume : beaucoup ont gouverné elles aussi ou étaient de précieuses conseillères pour le pharaon. Hatshepsout deviendra même pharaon. Sans oublier les couples mythiques qu’ont été Néfertiti et Akhénaton, et Néfertari et Ramsès le Grand - il l’élèvera même au rang de divinité comme lui et ne se remettra jamais vraiment de sa mort, il lui fera construire le tombeau le plus somptueux pour une reine dans la Vallée des Reines et la fera aussi représenter à ses côtés dans l’extraordinaire temple d’Abou Simbel. Les Égyptiens vénéraient également de nombreuses déesses, Isis, Sekhmet, Hathor, Bastet, Maât ( qui veille à l’équilibre du monde ).
La pièce maîtresse de cette exposition est sans conteste la salle qui reproduit le tombeau de la Reine Néfertari dans laquelle le visiteur découvre ce qu’il reste de son sarcophage en granit et plusieurs des objets qui ont été retrouvés dans sa tombe. Le tout a été découvert en 1904 dans la Vallée des Reines par l’archéologue italien Ernesto Schiaparelli, qui a été directeur du musée turinois.
En plus de ces salles consacrées à la vie éternelle, l’exposition consacre tout un espace au harem, ce qui permet au visiteur d’entrer dans le quotidien de ces Reines et princesses, femmes et sœurs du pharaon. « La vie dans le harem ne ressemble pas à celle des harems dans le monde arabe : la femme y est libre, elle y passe du bon temps, les enfants vivaient-là également et c’était un lieu de vie agréable » précise Francine Lelièvre. Le savon n’existait pas à l’époque, mais les femmes disposaient de toutes sortes de produits pour prendre soin de leur corps et de leur beauté, des produits que visiteur peut les découvrir dans cette salle : crèmes et onguents pour nourrir la peau, fards, poudre et le légendaire khôl, peignes pour les cheveux, parfums et bijoux somptueux.
Mais le harem royal n’était pas qu’un lieu de festivités et de plaisirs divers : il intégrait une école pour les enfants, on y menait aussi des activités agricoles et on y produisait des textiles et des produits artisanaux.
Cette salle de l’exposition nous offre une incursion intime dans cet univers où la femme égyptienne, plus particulièrement la Grande épouse royale, régnait sans partage.
L’ensemble de cette exposition est d’ailleurs habilement théâtralisé par la projection de vidéos conçues par Ubisoft (voir reportage ci-dessus), qui a « reconverti » l’un de ses jeux vidéo ayant pour cadre l’Égypte antique en l’expurgeant des scènes de combat pour produire ces scènes de la vie quotidienne dans le Nouvel Empire égyptien. Un mariage réussi entre la technologie numérique de notre siècle et une civilisation éternelle…