Roland-Garros : Loïs Boisson, la joueuse française que personne n'attendait

C'est ce qui fait la joie des passionnés de tennis : quand une totale inconnue crée l'exploit. Cette année, cet exploit porte le nom de Loïs Boisson, initialement classée à une anonyme 361e place au classement mondial. La joueuse française de 22 ans, qui sort juste de convalescence après une lourde blessure, est allée jusqu'en demi-finale de Roland-Garros, une première depuis 14 ans.

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Loïs Boisson

Loïs Boisson, 22 ans, 1 m75, 360e mondiale, est la révélation française du tournoi 2025 des internationaux de tennis de Roland-Garros à Paris, après sa victoire en 8e de finale. 

© AP Photo/Aurelien Morissard
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Résilience. Ce mot, on peut le lire tatoué sur son bras droit, et il prend tout son sens pour Loïs Boisson, la révélation surprise du tournoi de tennis de Roland-Garros 2025. La joueuse, au terme d'un match en deux heures face à la Russe Mirra Andreeva, 6e mondiale, est la première Française à atteindre les demi-finales depuis Marion Bartoli il y a 14 ans. Personne ne l'attendait à un tel niveau de la compétition, et encore moins elle, même si, au fil de ses victoires, elle ne cachait plus son rêve d'aller le plus loin possible. Un rêve qui a pris fin face à l'Américaine Coco Gauff qui l'a battue en deux sets et une heure de match, jeudi 5 juin. 

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"Résilience"

Lundi 2 juin 2025, pourtant, c'est un stade quasi-vide qui accueille la dernière Française en lice à Roland-Garros, hommes et femmes confondus. Loïs Boisson, à ce moment-là mais plus pour longtemps, est classée 361e mondiale et elle affronte la 3e mondiale, l'Américaine Jessica Pegula. Pour les experts de tennis et le public averti du tournoi parisien, il n'y a pas photo. Le match devrait être plié rapidement. Ce qui explique sans doute le désintérêt des spectateurs. Du moins au début de la rencontre. Car c'était sans compter sur la tenacité de la jeune joueuse de 22 ans, qui doit sa présence dans ce tournoi à une carte d'invitation des organisateurs. 

Au terme de plus de trois heures de duel, la Française crée l'exploit et se qualifie pour les quarts de finale. Cette fois devant des tribunes combles. Car, au rythme des points gagnés à la force du poignet de Loïs Boisson, la foule des grands jours a rejoint le court Philippe Chatrier, désormais totalement acquis à sa cause, sous le charme du spectacle offert par la jeune joueuse. C'est son prénom "Loïs, Loïs !" qui résonne sur les gradins.

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Mental de gagnante 

Peu nombreux étaient ceux qui auraient pu parier sur une joueuse invitée et d'autant plus tout juste remise d'une lourde blessure il y a un an. Revenue sur le circuit d'une longue convalescence après s'être déchiré un ligament du genou gauche juste avant la précédente édition de Roland-Garros, la Française de 1,75 m a toujours cru en ses chances : "Je sais que j'ai le niveau pour jouer à ce niveau-là." Reste désormais à "arriver à le faire sur tous les matches, à rester constante toute l'année", avance avec prudence la joueuse.

"Au départ, il y a pas mal de pression, de stress parce que c'est 'Roland'. Mais au final, je pense que je m'en sors assez bien. Quand j'arrive sur le terrain, je suis détendue, je suis relâchée et j'arrive à jouer mon tennis", confie-t-elle.

Je n'y aurais pas cru si on m'avait dit ça il y a deux semaines. Loïs Boisson, joueuse de tennis

"Je n'y aurais pas cru si on m'avait dit ça il y a deux semaines", s'est enthousiasmée la jeune Française. "J'espère aller plus loin et même gagner", a-t-elle même lâché, tout sourire face à un public conquis après sa victoire sur Pegula, au terme d'un scénario haletant en trois sets (3-6, 6-4, 6-4). 

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Parcours de résiliente

Fille d'un ancien basketteur français de haut niveau, Loïs Boisson a débuté le tennis à huit ans. Début 2021, à 17 ans, elle débarque sur le circuit principal à l'occasion du tournoi WTA 250 de Lyon. 

Mais ce n'est pas par hasard que la joueuse a choisi de se faire tatouer le mot résilience. "Jusqu'à se le faire tatouer en lettres capitales juste en dessous de son épaule droite. Pendant de longues années, celle-ci lui a donné du fil à retordre. Malgré les traitements et les arrêts forcés, ses algies ne s'estompaient pas", relate le journal Le Bien Public

Éliminée lors des qualifications de Roland-Garros en 2021, 2022 et 2023, elle faisait figure de très sérieuse candidate à une invitation pour le tableau principal l'année dernière, après avoir remporté quatre tournois sur terre battue au printemps 2024 sur le circuit secondaire. Mais, à deux semaines du tournoi parisien du Grand Chelem, elle s'était rompu le ligament croisé antérieur du genou gauche.

"Cette blessure a été très dure à accepter", se souvient l'athlète, qui a ensuite connu neuf mois de convalescence. "Après sa blessure, elle est revenue encore plus forte. Elle a validé toutes les étapes médicales et a tout mis en place pour être prête", a confié Sébastien Durand, son préparateur physique à France 3.

Puissance et discrétion

Discrète en dehors du court, Loïs Boisson l'est aussi pendant ses matches, montrant peu ses émotions entre les points. "Je sais que certains aimeraient qu'elle soit plus expressive, mais elle gère ça comme elle veut", convient son entraîneur Florian Reynat, son entraîneur, dans le journal L'Equipe.

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Elle, préfère laisser parler son tennis : un coup droit lifté surpuissant et une grande capacité de variation, deux armes redoutables sur terrain ocre. "Quand j'étais jeune, j'ai beaucoup joué sur cette surface. Mon style de jeu va bien avec. C'est là que je me sens le mieux", explique-t-elle.

J'adore la voir tourner autour de son revers pour frapper son coup droit et être dominante. Kim Clijsters, ancienne joueuse belge

Un style reconnaissable qu'apprécient plusieurs personnalités du tennis, comme l'ancien capitaine de Coupe Davis, le Français Guy Forget : "Elle a un vrai coup droit de terre battue, un peu comme certains joueurs espagnols, avec une balle qui gicle". "Elle joue haut, elle prend la balle tôt, elle prend la balle tard. Elle fait un court croisé, elle chope en revers. Elle a un vrai jeu de terre battue, à la (Lorenzo) Musetti (N.7 mondial)", estime encore l'ancien champion , aujourd'hui consultant sur FranceTV.

"J'adore la voir tourner autour de son revers pour frapper son coup droit et être dominante", complète la joueuse belge Kim Clijsters, ancienne N.1 mondiale.

Loïsmania !

Grâce à sa victoire en quart de finale, Loïs Boisson grimpe à la vitesse d'un de ses services (jusqu'à 196 km/h !, ndlr) dans le classement mondial, atteignant d'ors et déjà la 65e place. De quoi en faire, à 22 ans, la première Française au classement mondial.

C’est trop bien et j’ai déjà hâte d’être au prochain tour ! Loïs Boisson

Quels que soient ses futurs résultats, la jeune femme, qui préfère le short à la plus classique jupette, est déjà en passe de devenir l'une des joueuses préférées du circuit pour ses jeunes supporters présents à Roland-Garros, nombreux à la suivre sur les réseaux sociaux. Son compte Instagram affiche plus de 63 000 abonnés, un chiffre qui devrait augmenter à la faveur de son succès à Paris et au fil de ses prochains tournois. 

"J’ai vraiment des émotions que je ne peux pas décrire. C’est trop bien et j’ai déjà hâte d’être au prochain tour !", lançait celle qui se dit fan absolue de Rafael Nadal, à chaud après son cri de victoire. Comme cet immense champion le disait lui-même il y a quelques jours lors de ses adieux sur la terre battue, le tennis "ce n'est qu'un jeu !". Voilà une philosophie qui colle bien à la personnalité de Loïs Boisson. 

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