Fil d'Ariane
Le 24 octobre 2012, devant le Parlement britannique à Londres, des militantes féministes manifestent, habillées en suffragettes. Au centre de l'image, l'une des leaders du mouvement, Hélène Pankhurst, qui poursuit ainsi la lutte, 106 ans après son arrière grand-mère Emmeline.
Le 6 février 1918, le Parlement britannique adoptait la "Loi de 1918 sur la représentation populaire": 8 millions de femmes - âgées de plus de 30 ans - étaient ajoutées aux registres électoraux. Il fallut attendre encore dix ans pour que les femmes obtiennent de pouvoir voter dès 21 ans, comme les hommes.
Parmi les militantes qui ont lutté pour ce droit, les suffragettes ont marqué par leurs actions d'une violence inédite pour l'époque, même si leur influence fait aujourd'hui débat.
La fondatrice du groupe, Emmeline Pankhurst, prônait une "violence militante". Les suffragettes s'enchaînaient à des rails, brisaient des vitrines, sabotaient des lignes électriques et ont même fait exploser une bombe au domicile d'un ministre.
L'une de leurs actions les plus spectaculaires a été le suicide de la militante Emily Davison qui s'est jetée sous les sabots du cheval qui courait pour le roi lors du Derby royal d'Epsom en 1913.
Des centaines de suffragettes ont été emprisonnées et ont observé des grèves de la faim derrière les barreaux.
Beaucoup étaient gavées, une pratique interdite en 1913 par une loi qui a contraint les autorités à libérer les prisonnières lorsqu'elles étaient trop faibles. Elles étaient toutefois reconduites en prison lorsque leur état le permettait à nouveau.
Les opposants au droit de vote féminin voyaient dans ces tactiques de nouvelles preuves de l'irresponsabilité et de la fragilité émotive des femmes.
Emmeline Pankhurst a ainsi été emprisonnée et libérée onze fois. En 1999, le magazine Time l'a choisie pour figurer parmi sa liste des personnalités les plus influentes du XXe siècle. "Elle modela une certaine idée de la femme contemporaine: elle bouleversa l'ordre social jusqu'à un point de non-retour", écrivait le magazine.
"La campagne militante était absolument essentielle pour faire avancer le vote", estime Krista Cowman, professeure d'histoire à l'université britannique de Lincoln, dans un entretien avec l'AFP. "Avant cela, il y a eu cinquante années de campagne pacifiste qui, en réalité, ne fit rien".
Le 24 octobre 2012, devant le Parlement britannique à Londres, des militantes féministes manifestent, habillées en suffragettes brandissant des pancartes sur lesquelles on peut lire "Des actes, pas des mots".
Des historiens estiment cependant que le rôle joué par les femmes pendant la Première Guerre mondiale a contribué bien davantage à l'adoption de la loi de 1918 que les actions des suffragettes.
Aux champs, dans les usines, dans les bureaux et les commerces, les femmes se sont mises à occuper les postes des hommes mobilisés. Leur rôle dans la société s'en est trouvé profondément transformé.
Retrouvez ici notre article sur le film "Les suffragettes"
"Beaucoup de féministes espéraient que leur effort patriotique pendant la guerre appuierait leur demande d'accéder au droit de vote", affirme l'historien Joshua Goldstein dans "War and Gender". De fait, à la fin de la guerre, ont été adoptées les premières réformes vers une égalité des droits. "Cela marque un véritable commencement", estime l'historien, expert pour le film "Les Suffragettes" sorti en 2015. "Dans les années 1920, il y a eu tout un train de lois votées en Grande-Bretagne pour améliorer les conditions de vie des femmes, comme le divorce et l'égalité d'accès à certaines professions", ajoute-t-il.
Aujourd'hui le combat se poursuit, que ce soit sur les bancs du Parlement britannique, comme dans les médias. Dernière bataille en cours, celle qui se joue en ce moment sur la non-égalité des salaires femmes-hommes au sein de la prestigieuse BBC.
The stories of women who fought for our right to vote are inspiring but we are still on a journey when it comes to true equality #BBCpaygap https://t.co/mATpaS927n
— Maria_Miller (@MariaMillerUK) January 31, 2018
Retrouvez notre article >Grande-Bretagne : des salaires transparents pour plus d'égalité, c'est pas gagné