Au Royaume-Uni, les professionnels de la santé dénoncent un manque de fermeté, tant institutionnel que juridique, contre la pratique de l'excision. Représentant les différents Collèges royaux d'infirmières, de sages-femmes, de gynécologues et d'obstétriciens, ils ont rédigé
un rapport, intitulé « Lutter contre les mutilations sexuelles féminines », qu'ils ont remis le lundi 4 novembre à la chambre des communes.
Pour durcir la lutte contre cette pratique et apporter une meilleure protection à celles qui risquent d'en souffrir (voire d'en mourir), ils proposent 9 mesures clés. Dont la principale : considérer l'excision comme une maltraitance infantile.
« Nous ne demandons pas d'argent ni une nouvelle loi. Nous demandons simplement que la loi pour maltraitance infantile soit appliquée à tous les enfants », précise l'une des auteurs du rapport, Janet Fyle du Collège royal des sages-femmes.
« C'est inconcevable qu'un professionnel de santé n'ait pas l'obligation de signaler à la police une telle maltraitance, déplore-t-elle.
C'est important au nom de l'égalité de le faire en cas de mutilations sexuelles féminines. »24 000 filles menacéesAu moins 66 000 femmes, au Pays de Galles et en Angleterre, auraient été excisées et plus de 24 000 filles de moins de 15 ans seraient menacées de l'être. Comme en France, la pratique s'est installée sur le sol britannique par le biais de l'immigration. Dans de nombreux pays africains à forte émigration, l'excision touche plus de 85% des femmes. C'est le cas en Somalie, en Egypte, au Soudan, en Erythré et en Sierra Leone (chiffres de l'UNICEF).
Au Royaume-Uni, l'excision est illégale depuis 1985. La loi prévoit une peine allant jusqu’à 14 ans de prison à l’encontre de toute personne impliquée dans une telle opération. Mais aucun procès ne s'est tenu
« alors qu'en France une centaine de cas ont fait l'objet de poursuites judiciaires », souligne le journal britannique
The Guardian. Priorité à la sécurité des personnesPratique ancestrale, l'excision touche à des valeurs et à des croyances propres à des communautés, et ne relevant d'aucun commandement théologique d'aucune des grandes religions monothéistes. Mais, pour les auteurs du rapport, il est clair que la sécurité de l'individu doit passer avant le respect des sensibilités ethniques et culturelles. Un point soutenu par la présidente de l'association des femmes musulmanes, Shaista Gohir.
« Nous devons être conscients des sensibilités culturelles et religieuses, mais la sauvegarde de l'enfant contre les MSF (mutilations sexuelles féminines, ndlr) doit être la priorité. Si un enfant est en danger, il vaut mieux le protéger lui plutôt que des sentiments religieux et culturels », a-t-elle affirmé.
Pour assurer une meilleure prévention, le rapport demande une plus grande vigilance de la part des professionnels de santé. Toutes les fillettes issues de milieux culturels pratiquant l'excision devraient être considérées comme des enfants soumis à de forts risques de maltraitance et toutes les jeunes mamans devraient être interrogées pour déterminer le taux de prévalence de la pratique au sien de leur milieu familial, recommande les auteurs qui réclament aussi une plus grande implication de la part des enseignants.
Autre proposition : lancer un campagne de sensibilisation et d'information à destination du grand public selon la même stratégie de communication mise en oeuvre pour la lutte contre le VIH.
De son côté, la ministère britannique de la santé, Jane Ellison, a salué la publication de ce rapport mais n'a pas encore validé une seule des neuf recommandations.
« Une de mes priorités en tant que ministre de la Santé est de travailler de l'avant pour éradiquer les mutilations sexuelles féminines. Ayant soutenu en amont sa mise en oeuvre, je salue ce rapport et tous ceux qui ont contribué à sa rédaction. Ils représentent une très large partie des professionnels de santé.»