Lesbophobie

Rugby féminin, sexisme, homophobie : le "J'accuse" de joueuses en France

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Pink Rockets, mobilisées contre le sexisme

Capture d'écran du compte Instagram des Pink Rockets, l'équipe féminine du Stade français de rugby, le 9 mars 2025 au stade Jean Bouin. 

Capture d'écran @pinkrockets
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Propos humiliants, sexistes, lesbophobes ... Dans un communiqué publié sur les réseaux sociaux, les Pink Rockets, les joueuses de l'équipe féminine du Stade français de rugby réclament la démission de leur directeur sportif, qui réfute les accusations portées contre lui. 

"Ces paroles (...) ne sont pas de simples dérapages : elles participent à un système de domination et d'exclusion", dénonce le communiqué des joueuses françaises de rugby publié sur les réseaux sociaux. Elles appellent à la "démission immédiate du directeur sportif de toutes ses fonctions au sein du Stade français" et critiquent "l'inaction et les tentatives de dissimulation" du bureau de l'association.

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"Bouffeuses de chattes"

C'est la première fois que les joueuses de l'équipe féminine du club francilien prennent la parole publiquement depuis le début de cette affaire. 

Cet appel fait suite à des révélations publiées sur le site de Mediapart. Les témoignages, qui proviennent de différentes joueuses mais aussi de Laura, ancienne joueuse de 27 ans et directrice bénévole de l'équipe féminine, font état d'insultes homophobes, dénigrant la sexualité des joueuses. "'C’est dommage que tu sois une bouffeuse de chatte, comme tes coéquipières'. Voici le genre de remarque que Laura dit avoir encaissé pendant des mois de la part du directeur sportif de l’association", rapporte Mediapart. "Dans le dossier que j’apporte à la Fédération, il y a six témoignages, mais il faut savoir qu’il y a des filles qui n’ont pas osé témoigner, par peur que ça entache leur carrière rugbystique", souligne-t-elle. Auprès de France Inter, elle ajoute : "Moi-même, je suis en couple avec une femme. Je n’ai jamais vraiment osé dire stop"

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Après avoir subi ce qu'elle dit être une "nouvelle humiliation" à l'automne dernier, Laura a déposé plainte dans un commissariat, et a réalisé un signalement auprès de la Fédération Française de Rugby (FFR) en décembre dernier. 

Auprès de l’AFP, Laura évoque "des prises de parole très agressives» et se souvient d’une séance vidéo particulièrement dure : "Il a passé cinq minutes à me crier dessus devant tout le monde, dire que j’étais au rugby pour draguer les arbitres, pour avoir leur numéro".

 

Un blâme

La FFR a confirmé à l'AFP avoir reçu ce signalement sur sa plateforme dédiée et que le conseil de discipline du rugby français a été saisi. Le Stade français a indiqué avoir adressé un blâme au directeur sportif, à l'issue d'une enquête interne, et déclaré "de nouveau et sans retenue, tout notre soutien à la victime de ces faits".

Le directeur sportif réfute ces accusations. Suspendu de ses fonctions auprès de l'équipe féminine depuis début janvier et la conclusion de l'enquête interne, il a cependant conservé le reste de ses prérogatives au sein de l'association sportive du club parisien.

"On peut comprendre que ces propos choquent, mais ils n'ont aucune portée homophobe dans sa bouche", assure à France Inter l'avocat de l'ancien directeur sportif, Me Karim Beyloumi. "C'est quelqu'un qui est très investi pour apporter aux joueuses les mêmes conditions que leurs homologues masculins. Il n'y a aucune raison aujourd'hui pour qu'il ne continue pas son engagement, qu'il a depuis dix ans, auprès du rugby féminin." 

Nous sommes dans l'incompréhension totale face au manque de soutien de la part du bureau de l'association. Aucune communication, ni réunion d'information n'ont été faites sur le sujet. Extrait du communiqué Pink Rockets

"Nous avons pris connaissance de la sanction - un blâme - par l'intermédiaire d'un communiqué intervenu plus de 5 mois après la dénonciation des faits", regrettent les joueuses. "Nous sommes dans l'incompréhension totale face au manque de soutien de la part du bureau de l'association. Aucune communication, ni réunion d'information n'ont été faites sur le sujet", dénonce le communiqué des Pink Rockets, l'équipe féminine du Stade français.

Pour un rugby inclusif

Sur France Inter, leur capitaine Eloïse, au nom de ses coéquipières, souhaite que cette lettre ouverte aille plus loin : "l'objectif de prendre la parole aujourd'hui, c'est de montrer que ce ne sont pas des paroles en l'air, on ne peut pas avoir ce genre de comportement aujourd'hui".

Pour Laura, ce sport doit rester inclusif : "'c'est cette tolérance aux différences physiques, à la religion, à la différence d'idées et l'acception des autres, moi ça m'a permis de mieux vivre grâce à ce sport".

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