Ras-le-bol ! Les actrices américaines, à notoriété égale, sont bien moins rémunérées que leurs homologues masculin. En publiant une tribune incendiaire sur internet, l'actrice Jennifer Lawrence dénonce le sexisme dans l'industrie américaine du film. Et sa colère fait des vagues, qui ne sont pas nouvelles...
D'après le magazine Forbes, l'acteur le mieux payé d'Hollywood l'an dernier était Robert Downey Jr. L'acteur a engrangé 80 millions de dollars, soit 28 millions de plus que l'actrice la mieux payée, Jennifer Lawrence, avec 52 millions de dollars
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(Richard Shotwell/Invision/AP, File)
Jennifer Lawrence, le 9 juillet 2015.
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Pas contente, Jennifer Lawrence ! Dans une tribune publiée sur internet, l'actrice de "Hunger Games" ne s'embarrasse pas de métaphores " Je gagne moins que les gens qui ont la chance d'avoir une bite" écrit-elle, sans discussion possible. J’en ai marre d’essayer de trouver la manière “adorable” de donner mon point de vue et de faire en sorte d’être appréciée ! Ça fait chier. Je ne crois pas avoir déjà travaillé pour un homme avec des responsabilités qui passe du temps à se demander comment moduler sa voix pour être entendu. Juste être entendu."
"Je ne pense pas que ce soit un truc de diva de vouloir le même salaire..."Sienna Miller
Un peu plus loin, la lauréate de l'Oscar de la meilleure actrice en 2013 enfonce le clou : "tous les hommes avec lesquels je travaille ne s’inquiètent pas de passer pour “difficiles” ou “gâtés” (...) Mais c’est un élément de ma personnalité contre lequel je me suis battue durant des années et, d’après mes statistiques, je ne pense pas être la seule femme dans ce cas-là. Est-on conditionnée socialement à se comporter ainsi ? Nous n’avons le droit de vote que depuis quand, 90 ans ? Je pose vraiment la question [...]. Exprimerait-on nos opinions de façon à ce qu’elles “n’offensent pas” ou “ne fassent pas peur” aux hommes ?"
Jennifer Lawrence, 25 ans, une actrice multimillionaire qui revendique à Hollywood son anti-conformisme et sa franchise
(Richard Shotwell/Invision/AP, File)
Cependant, elle reconnaît que "C’est difficile pour moi de parler de mon expérience de travail car je sais très bien qu’on peut difficilement s’identifier à mes problèmes". On ne saurait mieux dire. A Los Angeles, selon des chiffres publiés l'année dernière les acteurs "de niveau intermédiaire" gagnent 52.000 dollars à l'année. Les "silhouettes" doivent se contenter de 1.000 dollars par an. Un pourboire pour Jennifer Lawrence, l'actrice la mieux payée d'Hollywood. L'an dernier, ses comptes en banque ont grossi de 52 millions de dollars. Une somme qui peut certes donner le vertige mais qui est, somme toute, en rapport avec ce que rapporte ses prestations d'actrice à l'industrie cinématographique.
Sauf que son collègue Robert downey JR, lui, à notoriété égale, a engrangé 28 millions de dollars de plus. L'interprète d' Iron Man a touché 80 millions de dollars en 2014. Une disparité qui cache, en fait, un réel malaise dans la profession. Comme l'indique le tableau ci dessous :
Un tableau signifiant et qui montre bien les disparités salariales entre hommes et femmes
(crédit The Wolywood Reporter)
C'est le piratage des mails de Sony Pictures qui est à l'origine de cette fronde : "Quand j’ai appris à travers le hack (piratage, ndlr) de Sony à quel point j’étais moins bien payée que les gens chanceux dotés d’une bite, je n’étais pas en colère contre Sony. J’étais en colère contre moi-même. J’ai échoué en tant que négociatrice parce que j’ai abandonné trop tôt. Je ne voulais pas m’obstiner à me battre pour des millions de dollars dont, franchement, grâce à deux franchises, je n’ai pas besoin. " Les actrices Emma Watson, Jessica Chastain ou Elizabeth Banks ont salué son courage. Toutes avaient certainement en mémoire les mots de Patricia Arquette, en février 2015, lors de la remise de son Oscar. C'était en février 2015 :
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Mais Sienna Miller est allée plus loin. L'actrice britannique a révélé qu'elle aussi avait été victime d'inégalité salariale. On lui a proposé "moins de la moitié" de ce que sa co-star masculine pour jouer dans une production de Broadway. Elle a tout bonnement refusé. Elle expliquait sur E! Online : " J'ai l'impression que les femmes n'auront pas ces jobs à moins de capituler, et c'est la vérité. Je ne pense pas que ce soit un truc de diva de vouloir le même salaire si vous faites la même chose que quelqu'un. Je comprends la différence qu'il y a entre les gens commercialement, mais ça veut dire que si vous vous défendez en réponse, vous n'aurez pas ce travail. Et si vous aimez ce travail et qu'il vous passionne, c'est vraiment difficile. Mais ça va demander des sacrifices, c'est sûr. Ce n'est pas une question d'argent, c'est une question de principe", a-t-elle expliqué.
Les femmes, toujours sous-représentées à l'écran et derrière l'écran
Et les hommes, ces grands timides, ont été plus discrets. Seul Bradley Cooper (Very Bad Trip) s'est montré sinon solidaire, du moins compréhensif : "Il y a un double standard partout le monde, évidemment. Ce n'est qu'un aspect. A chaque fois qu'une voix peut se faire entendre, et être écoutée - quelque chose comme Sienna [Miller] a fait ou Jennifer - c'est super. Je pense que ça fait une différence".
Sienna Miller, le 9 octobre 2015, au London Film Festival
Oct. 9, 2015. (Photo by Grant Pollard/Invision/AP)
Une affaire qui ne relève pas d'une tempête dans un verre de champagne.
Début octobre, la Californie s'est dotée d'une loi censée défendre l'égalité salariale homme-femme. A cette occasion, la sénatrice démocrate Dianne Feinstein pointait le fait que les californiennes gagnaient en moyenne" 84 cents pour chaque dollar gagné par un homme". Selon le Centre d'étude des femmes dans l'espace télévisuel et cinématographique basé à San Diego en Californie les femmes restent sous représentées à l'écran et derrière l'écran. Si seulement 7 % des 250 plus grands films en 2014 ont été réalisés par des femmes, elles n'obtiennent pas d'avantage d'équité dans les métiers du cinéma. Dans un rapport joliment intitulé "Le plafond de celluloïd"( en référence à la matière qui compose la pellicule de cinéma), l'université note : "En 2014, les femmes représentaient 17% de tous les réalisateurs, scénaristes, producteurs, producteurs exécutifs, éditeurs et cinéastes qui travaillent sur le top 250 des films. Concernant les autres fonctions, les femmes représentaient 11% des auteurs, 23% des producteurs, 19% des producteurs exécutifs, 18% des éditeurs, et 5% de cinéastes"Jennifer Lawrence, qui tourne actuellement le film de science-fiction Passengers est actuellement en négociations pour tenir la vedette du prochain long métrage de Darren Aronofsky, du réalisateur de Noé. Les discussions promettent d'être serrées...