Les autorités iraniennes ont confirmé, mercredi 8 septembre, la suspension de l'exécution par lapidation. Ce verdict « est en cours de réexamen », a précisé le ministre iranien des Affaires étrangères. Selon la justice iranienne, Sakineh Mohammadi-Ashtiani est coupable d'adultère et de complicité dans le meurtre de son mari. Mais d'après ses avocats, elle a d'abord été condamnée à la lapidation uniquement pour adultère, la complicité de meurtre ayant été ajoutée ultérieurement par les autorités. En tout cas, depuis 2006, Sakineh Mohammadi-Ashtiani est détenue dans la prison de Tabriz (nord-ouest de l'Iran) et vient
d'être condamnée à 99 coups de bâton pour avoir propagé la « corruption et l’indécence » en raison de la publication d’une photo d’elle sans foulard dans le quotidien Times de Londres du 28 août 2010 à la BBC. Une peine qui lui avait déjà été infligée quelques années plus tôt pour "relations illégales".
« AVEUX FORCÉS » En juillet 2010, Sakineh Mohammadi-Ashtiani semblait avoir gagné une première bataille quand Téhéran, après avoir émis l'idée de l'exécuter par pendaison, avait décidé une première fois de suspendre temporairement sa peine. Mais la situation s'est brusquement retournée. Le 11 août , Sakineh Ashtiani apparaît, le visage flouté, à la télévision iranienne dans un simulacre d’interview. Là, elle avoue. Dans sa langue natale, l’azéri, elle reconnaît avoir commis l’adultère et, surtout, avoir organisé le meurtre de son mari. Pour ses avocats, il s'agit d'aveux forcés. « Elle a été frappée violemment et torturée jusqu'à ce qu'elle accepte d'apparaître face à la caméra », a déclaré Me Kian qui n'a pas pu voir sa cliente depuis deux ans. « Ces aveux renforcent nos craintes que l'Iran exécutera bientôt cette femme », s'est alarmée l'organisation Human Right Watch. Depuis, Téhéran semble inflexible. Répondant à son homologue brésilien qui avait offert l'asile politique à Sakineh Mohammadi-Ashtiani, le président Mahmoud Ahmadinejad a déclaré le 17 août : « Il n'y a aucun besoin de créer un problème au président Lula. L'Iran préfère exporter sa technologie au Brésil que de telles personnes. » Le dirigeant iranien rejette toute forme d'ingérence dans cette affaire et demande aux pays occidentaux de ne pas intervenir.
PRESSION INTERNATIONALE Mais la pression internationale ne se relâche pas. Bien au contraire. La pétition internationale « Aidez-nous à libérer Sakineh » a dépassé les 200 000 signatures. Celle lancée par le philosophe Daniel Salvatore-Schiffer dans les plus grands journaux d'Europe, « Lettre ouverte aux autorités iraniennes », compte désormais 130 000 signatures. De grands noms viennent de la signer : le romancier Umberto Eco, la franco-colombienne Ingrid Betancourt, l'avocate iranienne Shirin Ebadi, le médecin Luc Montagnier, le dramaturge Dario Fo. Londres a dénoncé « le refus persistant » de Téhéran en faisant part de sa réprobation à l'ambassadeur d'Iran. L'Union européenne et le Vatican ont fait des démarches officielles auprès de Téhéran en faveur de la condamnée, auquel le Parlement européen a apporté un soutien unanime. En France, le chef de la diplomatie française Bernard Kouchner a dit être prêt à se rendre à Téhéran pour tenter de la faire libérer et la première dame, Carla Bruni-Sarkozy, a adressé une lettre personnelle à Sakineh. Elle lui écrit : « Du fond de votre cellule, sachez que mon mari plaidera votre cause et que la France ne vous abandonnera pas ». Quelques jours plus tôt, le ministre français des Affaires étrangères avait déjà assuré que la France ne ménagerait « aucun effort pour [la] sauver d'une mort atroce ». Quant à la pétition lancée par le philosophe français Bernard-Henri Lévy qui avait été publiée le 17 août par le quotidien
Libération, elle prend du poids. Elle reçoit 1 800 à 2 000 signatures par jour. Elle compte notamment celles de deux anciens présidents français, Jacques Chirac et Valéry Giscard d'Estaing, et de nombreuses personnalités, les écrivains Jorge Semprun et Patrick Modiano, le chanteur engagé Bob Geldof et le prix Nobel de la paix Jody Williams.