Sophie Wilmès, vice-Première ministre belge, la politique au coeur

Sophie Wilmès, 47 ans, a été pendant un an, d'octobre 2019 à octobre 2020, la première femme à occuper ce fauteuil dans l'histoire de la Belgique. Mariée, maman de quatre enfants, portrait d'une femme qui, après des études de communication et une carrière dans la finance, a fait le choix de la politique.
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©Instagram/Sophie Wilmès
Sophie Wilmès, 44 ans, est la première femme à devenir Première ministre en Belgique.
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©page facebook/Sophie Wilmès
Sophie Wilmès, Vice-premier ministre et ministre du Budget de la Fonction publique, n'hésite pas à manier la truelle en pleine campagne électorale, ici en septembre 2018.
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"Une bleue au Seize (surnom donné au 16 rue de la Loi, à Bruxelles, siège du gouvernement fédéral , ndlr) pour emmener le gouvernement fédéral en affaires courantes après le départ de Charles Michel pour cause de présidence de l’Union européenne ?", s'interrogeait le quotidien belge Le Soir...  Samedi 26 octobre 2019, Charles Michel, Premier ministre sortant, officialise ce qui se murmurait depuis des jours à l'oreille des politiques : Sophie Wilmès deviendra la première femme Première Ministre de Belgique.
Dès le lendemain de cette annonce, comme le veut la tradition, Sophie Wilmès a été reçue en audience au Palais de Bruxelles par Sa Majesté le Roi, qui l’a nommée solennellement Première Ministre. Elle devient la première femme à accéder au 16 rue de la Loi.

Une libérale francophone

Née en janvier 1975 à Ixelles à Bruxelles, Sophie Wilmès est élue dans la périphérie bruxelloise. La politique, elle est un peu tombée dedans toute petite. Si son père a été professeur d'économie, puis régent de la Banque nationale de Belgique, il a été également membre de plusieurs cabinets ministériels, tout comme sa mère qui, elle-aussi, a travaillé dans plusieurs cabinets.

Agée de 44 ans, mariée et mère de quatre enfants, l'ex vice première ministre s'était à  plusieurs reprises prononcée publiquement en faveur de la formation rapide du gouvernement fédéral, ce qui laissait présager qu'elle ne dirait pas non si jamais on lui proposait d'en prendre la tête.
 
Alors qui est Sophie Wilmès ? Si le quotidien Le Soir la présente comme une véritable protagoniste dans la famille libérale, elle-même n'hésite pas à se présenter sur internet, à travers un site baptisé : "Sophie Wilmès, qui suis-je ?". Elle y livre un CV en bonne et due forme, mais peu de choses d'ordre privé, hormis sa date et son lieu de naissance. Après une licence en communication appliquée, elle devient gestionnaire des finances à la Commission européenne, puis retour dans le privé au poste de conseillère économique et financier au sein d’un cabinet d’avocats d’affaires.
 
Les opinions, c’est comme les talons aiguilles. Si vous ne savez pas les porter, autant les laisser dans le placard…
Sophie Wilmès
 
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Affiche de campagne du MR (Mouvement réformateur), en mai 2019, Belgique.
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Sur son cursus politique, la ministre met en avant son expérience d'élue locale, notamment à Uccle en 2000, A ce titre, elle a pu siéger au sein de divers conseils d’administration d'associations de quartier, certaines agissant surtout dans les quartiers les moins favorisés. De 2007 à 2015, elle occupe le poste de Première Echevine à Rhode-Saint-Genèse, une commune située en Région flamande dans la province du Brabant flamand. Elle est élue députée fédérale de 2014 à 2015.

Elle parle trois langues, le Français, l'Anglais et le Néerlandais. 

En politicienne avertie, Madame la Première ministre belge sait aussi manier la petite phrase tout comme le langage de l'image publique. En juillet dernier, alors que certains membres du Mouvement réformateur, le parti de Charles Michel, réclamaient dans la presse, de manière anonyme, son départ à la tête de la formation, la quadragénaire se fendait d'un tâcle bien senti à leur adresse. "Les opinions, c’est comme les talons aiguilles. Si vous ne savez pas les porter, autant les laisser dans le placard…", lançait-elle via ses comptes FB et Twitter.
 
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©FB/Sophie Wilmès
Car Sophie Wilmès se présente comme une internaute aguerrie, voire une addict des réseaux sociaux. Elle y relaie chacun de ses passages télévisés, ou entretiens dans la presse. Sur sa page Facebook ou sur son compte Instagram, l'élue locale publie de nombreux selfies avec les personnes rencontrées au marché du village, lors de réunions publiques, ou en déplacement depuis sa voiture...
 
On la découvre aussi amatrice de sport. En bonne supportrice, elle salue la victoire de l'équipe nationale de hockey. 
 
La "Belgitude" au coeur, dans un de ses nombreux tweets, elle célèbre la fête nationale le 21 juillet, et s'enthousiasme du fait que son pays occupe la 18ème place au classement mondial du bonheur.
 
 
C’est une femme et elle a probablement l’habitude qu’on minimise son rôle.
Caroline Van Wynsberghe, politologue
Les réactions à cette nomination se sont multipliées tout au long du week-end. Dans un billet publié sur le site de la RTBF, Caroline Van Wynsberghe, politologue, salue le fait qu'on féminise officiellement le titre pour saluer cette première historique :"On a bien compris que les stéréotypes de genre ont la peau dure, mais on nous épargne les " félicitations, Madame le Premier ministre ". Il faut dire qu’en Belgique francophone, le décret sur la féminisation des noms de métier date de 1993. C’est dire si ça a eu le temps de percoler ! ". Une nuance néammoins à l'enthousiasme ressenti par cette nomination, car pour la politologue, certains "grincheux" ne retiendront que Sophie Wilmès prend la tête d’un gouvernement en affaires courantes et minoritaire, "comme pour amoindrir sa détermination, son engagement et ses responsabilités. C’est une femme et elle a probablement l’habitude qu’on minimise son rôle. (...) Elle ne serait pas un premier choix, mais une remplaçante".
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©Kroll
Raison de plus donc pour la remercier "d’avoir accepté cette mission qui paraît quasi impossible. Merci de votre courage et d’avoir ainsi indirectement mis le pied dans la porte de l’égalité femmes-hommes", conclut la politologue.
 

Première ministre par interim, seulement ?

"Je vais peut-être vous surprendre mais j’espère rester (Première ministre) le moins longtemps possible. Mon objectif est que soit créé un gouvernement de plein exercice avec les coudées franches pour répondre aux défis pour le pays", déclarait Sophie Wilmès au soir de sa nomination lors du JT de RTL-TVI, reconnaissant que son gouvernement avait "peu de marge de manœuvre pour fonctionner".
 
J’espère rester (Première ministre) le moins longtemps possible.
Sophie Wilmès, Première ministre belge
Ainsi répondait-elle à ceux, dont Theo Francken, membre du parti nationaliste flamand N-VA, qui estiment qu'elle a été nommée car "presque tout le monde avait quitté le bateau" et qu’elle était "presque inconnue en Flandre".

Quant à la question : faut-il l'appeller Premier ministre ou Première ministre ? Elle assure ne préférer aucune des deux formulations :"Je préfère celle qui met l’interlocuteur à l’aise, tant que cela commence par madame" .
 
La Belgique à la traîne malgré les quotas

«Si l’obtention du droit de vote (1948) a constitué une étape décisive dans l’accès des femmes à la citoyenneté politique, elles n’ont pendant longtemps pas bénéficié des mêmes possibilités que les hommes de prendre activement part au processus de décision politique», analyse l’Institut pour l’Égalité des Femmes et des Hommes sur son site.

En Belgique, un système de quotas impose la parité hommes-femmes sur les listes électorales.

En 1994, le Parlement adopte un projet de loi interdisant aux partis politiques de composer des listes électorales sur lesquelles figurent plus de deux tiers de membres du même sexe. Plus récemment, en 2002, la Constitution a été modifiée afin d’y inscrire le principe de l’égalité des hommes et des femmes, d’organiser leur égal accès aux mandats électifs et publics et d’imposer la mixité de tous les organes exécutifs, quel que soit le niveau pouvoir. Plusieurs lois imposant la parité sur les listes électorales ont depuis été adoptées.

Selon les chiffres de l’Institut pour Égalité des Femmes et des Hommes, on voit bien une augmentation de femmes élues à la suite de l’adoption de ce dispositif, sauf pour certains postes, comme bourgmestres ou au sein du gouvernement fédéral par exemple.

Un short trop sexy à la Chambre ?

«A l’intérieur des partis et des espaces politiques, j’ai néanmoins l’impression que c’est en train de bouger et qu’on trouve moins de sexisme. On se rappelle notamment de la remarque de Sigfried Bracke en 2010 à une jeune femme tout juste élue à la Chambre et qui était venue en mini-short. Il lui avait dit que cela ne se faisait pas et que cela était trop sexy. On entend moins ce genre de remarques», explique la politologue Petra Meier. Alors pourquoi la Belgique a-t-elle dû attendre pour voir une femme Première ministre ? «Nous sommes effectivement retardataire sur cette question. Je pense que ça ne peut être que la suite logique des choses. Grâce aux quotas, nous avons une certaine masse de femmes qui sont entrées en politique. C’est important parce qu’on sait que les élu.e.s qui se représentent ont davantage de chance d’être reconduite.s. Les femmes quittent plus tôt la politique que les hommes mais comme leur nombre augmente, certaines ont le temps de faire carrière, de rester.» (article à retrouver sur le site de la RTBF)