Wini Omer est poursuivie depuis le 24 juillet pour prostitution.
Célèbre militante de la cause des femmes au Soudan, cela ne l'empêche pas de poursuivre le combat. A 30 ans, elle se refuse à garder le silence sur la condition de ses compatriotes.
Wini Omer sait bien qu'elle prend des risques, pourtant elle n'hésite pas à témoigner face à la camera. En février 2018, cette journaliste soudanaise a été arrêtée alors qu'elle participait à une réunion, en présence d'une autre femme et de deux hommes.
Des détectives de police ont brisé une fenêtre et ont fait irruption à l'intérieur, des voisins se sont rassemblés dans l'appartement et ont dit que c'était un lieu de prostitution. Nous avons essayé de leur dire que c'était une maison, qu'il s'agissait d'une réunion normale. Nous leur avons dit qu'il n'y avait aucune raison de d'insister, mais des policiers ont soudainement fait irruption par une fenêtre et nous ont accusé de ces choses.Wini Omer, militante soudanaise pour les droits de la femme
Relachée après cinq jours de détention, Wini Omer est aujourd'hui poursuivie pour prostitution et atteinte à l'ordre public. Très active sur les réseaux sociaux, la militante féministe affirme qu'il s'agit d'une tentative d'intimidation.
Quand les autorités ciblent des militants, c'est pour leur envoyer un message, pour leur faire comprendre qu'ils sont observés, que l'Etat les opprimera and leur imposera ses conditions.Wini Omer, militante soudanaise pour les droits de la femme
Il faut dire qu'au Soudan, Wini Omer, femme, journaliste et militante, cumule les risques, face à une justice largement régie par les lois conservatrices du gouvernement d'Omar El-Béchir, ancien militaire au pouvoir depuis 27 ans.
En 2016, un rapport de l'ONG Human Rights Watch alertait sur les méthodes du régime : passages à tabac, arrestations arbitraires, ou encore détentions illégales de personnes accusées de dissidence. Amnesty international dénonce de son côté l'arrestation systématique des journalistes.
Les femmes, elles, sont particulièrement ciblées. Chaque année, elles sont des milliers à être condamnées à des coups de fouets ou de lourdes peines de prisons.
Parmi les chefs d'accusation les plus fréquents : le refus de mariage forcé ou le simple fait de porter une jupe.
Les lois considèrent que les femmes sont un danger, que leur but est de séduire. Elles considèrent que la forme de leur corps provoque les hommes et incite à la criminalité. Cette mentalité revient à dire qu'être une femme, c'est presque un crime au Soudan.Nabil Abid, avocat soudanais pour les droits de l'Homme
Déjà inquiétée en 2009, pour le port d'une tenue jugée indécente, Wini Omer est conciente qu'elle n'en a pas fini avec la justice. Aujourd'hui la militante attend la date de son procès et poursuit sa lutte pour les droits des femmes.