Frotteurs, agresseurs

Transports en commun : lieux de tous les dangers pour les femmes

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Campagne contre violences sexuelles dans le métro

Visuel de la campagne contre violences sexistes et sexuelles dans les transports en commun lancée par le gouvernement français. 

Capture d'écran/ site officiel arretonslesviolences.gouv
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Plus 86 % : depuis dix ans en France, le nombre de victimes de violences sexuelles dans les transports a explosé. Sept femmes sur dix déclarent en avoir été déjà victime une fois au cours de leur vie, selon une étude de l’Observatoire national des violences faites aux femmes. 8 femmes sur 10 se disent en alerte lorsqu’elles empruntent les transports. 

Prendre le bus, le métro, le tram ... Un geste ordinaire du quotidien qui peut tourner à un épisode traumatisant. C'est le constat que l'on peut dresser à la lecture d'une récente enquête menée notamment dans le métro parisien. Main aux fesses, frottements, regards insistants, insultes ... Des situations qui parfois dégénèrent et tournent au drame, pouvant aller jusqu'au viol. 

Le nombre de victimes de violences sexuelles dans les transports flambe de 86 % en près de dix ans. Selon l’enquête ENOV conduite pour la RATP, 7 femmes sur 10 ont déjà été victimes de violences sexistes et sexuelles dans les transports franciliens au cours de leur vie. 

Cette proportion est encore plus élevée chez jeunes avec 80 % des femmes de 15 à 18 ans et 90 % des femmes de 19 à 25 ans qui déclarent avoir été victimes au moins une fois dans les transports en Ile-de-France. 

Quand on sait que 7 % des victimes seulement déposent plainte, on peut imaginer à quel point ce phénomène reste extrêmement sous-évalué.

Chiffres clés 

4 091 faits directement recensés en 2023 par les agent.es des compagnies 

3 374 victimes enregistrées par les forces de sécurité en 2024 (3 % des victimes de violences sexuelles enregistrées tous lieux confondus) 

8 femmes sur 10 sont en alerte lorsqu’elles empruntent les transports 

91 % des victimes violences sexistes et sexuelles dans les transports en commun et collectifs en France sont des femmes selon l’enquête « Vécu et ressenti en matière de sécurité » du ministère de l’Intérieur.

99 % des auteurs de ces violences sont des hommes

Ces chiffres sont publiés dans le cadre d'une Lettre thématique dédiée aux violences sexistes et sexuelles dans les transports en commun en France publiée par l’Observatoire national des violences faites aux femmes. Afin de mesurer l’ampleur et la nature de ces violences, la Miprof (Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains) s’est appuyée sur les données des ministères des Transports et l’Intérieur et celles des opérateurs de transports.

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Frottements, attouchements, tentatives de viol et viols

Manon Marguerit, chercheuse en urbanisme, confirme que les agressions ne se limitent pas aux frottements ou à l’exhibitionnisme mais sont aussi des regards menaçants ou insistants, des insultes, des attouchements et des viols ou tentatives de viol. 

Qu’une femme ou une fille modifie ses horaires ou ses trajets par peur d’être agressée doit nous interroger sur la liberté d’accès de toutes les citoyennes au service public des transports. Roxana Maracineanu, secrétaire générale de la Miprof

Pour Raphaël Adamczak, doctorant en psychologie sociale, cette violence masculine "a pour but de rappeler que cet espace appartient au groupe masculin".

La peur associée et intériorisée conduit les femmes à adopter des stratégies de contournement pour prévenir l’agression et être en capacité de la fuir plus rapidement. "Qu’une femme ou une fille modifie ses horaires ou ses trajets par peur d’être agressée doit nous interroger sur la liberté d’accès de toutes les citoyennes au service public des transports", souligne Roxana Maracineanu, secrétaire générale de la Miprof.

Transports scolaires : les personnes les plus vulnérables visées

Cette Lettre thématique met aussi en lumière une autre réalité : celles des violences sexuelles commises sur des personnes vulnérables par des chauffeurs de transports sanitaires, de bus et de bus scolaires. 

L’enquête publiée en 2024 par l’association Disclose en collaboration avec Radio France montre qu’entre 2005 et 2024, 152 personnes ont été victimes de violences sexuelles commises par leur chauffeur dans les transports sanitaires, dans les bus et dans les cars scolaires. 67 % étaient mineures et 23 % étaient en situation de handicap. 68 % des chauffeurs auteurs étaient des récidivistes.

Comment lutter ?

Des dispositifs pour renforcer la sécurité des femmes ont été mis en place par les opérateurs de transports en commun : marches exploratoires avec des usagères, descentes à la demande, bornes d’alerte et canaux de signalement. 

C’est en exerçant ensemble un contrôle social que nous participerons à bannir les violences faites aux femmes, aux personnes en situation de handicap, aux enfants. Miprof

"Ces données doivent provoquer une prise de conscience", concluent les rapporteurs, "nous devons être attentifs et attentives aux situations qui nous entourent pour porter assistance aux personnes en danger ou solliciter de l’aide. C’est en exerçant ensemble un contrôle social que nous participerons à bannir les violences faites aux femmes, aux personnes en situation de handicap, aux enfants, et que nous créerons des espaces publics sûrs et habilitants, c’est-à-dire accessibles et inclusifs ".

Une prise de conscience qui semble marquer des points depuis quelques années, au rythme des campagnes et des alertes lancées sur les réseaux sociaux. La mission ministérielle souligne que la part des victimes dans les transports en commun franciliens ayant déclaré avoir été aidées par une tierce personne a plus que doublé par rapport à 2016 et 4 victimes sur 5 ayant sollicité un agent ou une agente de la RATP se sont senties bien prises en charge, écoutées ou comprises. 

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#arrêtonslesviolences

Les autorités ont lancé une campagne pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles dans les transports, à retrouver ici.

Une loi pour renforcer la sécurité dans les transports

Le 6 mars 2025 : la commission mixte paritaire, composée paritairement de sénateur.rice.s et de député.e.s, a adopté la proposition de loi relative au renforcement de la sûreté dans les transports. L’article 18 bis impose le contrôle des antécédents judiciaires de tous les conducteurs de transport public collectif routier impliquant un contact habituel avec des mineurs ou des majeurs en situation de vulnérabilité (ex : les personnes handicapées). 

Ce contrôle doit être réalisé avant l’embauche puis chaque année. En cas de condamnation pour des faits, notamment, de violences sexuelles, la personne concernée ne peut pas être embauchée ou ne peut pas poursuivre ses fonctions. Ces incapacités s’appliquent également aux personnes qui interviennent dans les mêmes transports de manière permanente ou occasionnelle, à quelque titre que ce soit, y compris bénévole.

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