Fil d'Ariane
Mains aux fesses, commentaires à caractère sexuel ... Deux ans après un rapport accablant sur la culture sexiste régnant au sein des institutions politiques australiennes, le Parlement se retrouve secoué par de nouvelles accusations d'agressions sexuelles.
Un premier rapport commandé par le gouvernement australien publié en novembre 2021 avait révélé l'ampleur du harcèlement sexuel parmi ceux qui travaillent pour certaines de ses plus hautes fonctions législatives et élues. Une nouvelle enquête publiée en juin 2023 parle de "culture sexiste" au sein du parlement australien.
En 2021, une enquête sur la "culture sexiste" au Parlement avait révélé des preuves accablantes de harcèlement sexuel et d'intimidation, visant aussi bien des législateurs que le personnel. Une personne sur trois travaillant alors au Parlement avait déclaré avoir été "victime d'une forme de harcèlement sexuel pendant son travail", selon le rapport Respect@Work (respect au travail) commandé par le gouvernement. Parmi les femmes parlementaires du pays, 63 % avaient participé à l’enquête. Elles ont déclaré avoir été victimes de harcèlement sexuel à un taux plus élevé (40 %) que les hommes (26 %).
La culture du Parlement australien a été mise à nu ces dernières années, et il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. Zali Steggall, femme politique australienne
Moins de deux ans plus tard, le pays est à nouveau confronté aux abus de sa classe politique, avec de nouvelles accusations d'agressions sexuelles portées contre un sénateur conservateur.
Selon Zali Steggall, une femme politique indépendante, les femmes ont subi des niveaux "terrifiants" de harcèlement et d'agressions sexuelles dans le cadre de leur travail au Parlement. "La culture du Parlement australien a été mise à nu ces dernières années, et il reste encore beaucoup de chemin à parcourir", dit-elle.
La semaine dernière, la sénatrice indépendante Lidia Thorpe a pris la parole en pleine séance, accusant son collègue, le sénateur du parti libéral David Van, de l'avoir agressée sexuellement en 2021. Dans un discours au Sénat, elle a affirmé avoir été la cible de "commentaires à caractère sexuel", acculée dans une cage d'escalier, "touchée de manière inappropriée" et avoir reçu des "propositions" de la part d'"hommes puissants".
Le sénateur Van a qualifié ces allégations de "scandaleuses", "fabriquées" et "totalement fausses".
L'ex-sénatrice Amanda Stoker, du Parti libéral, a ensuite diffusé un communiqué soutenant que David Van lui avait "pincé les fesses" à deux reprises lors d'une fête de bureau en 2020.
Dans ce contexte, les deux principaux partis australiens ont passé la semaine dernière à se rejeter mutuellement la responsabilité de la mauvaise gestion d'un autre dossier : une allégation de viol formulée par une ancienne assistante politique, Brittany Higgins.
En 2021, la jeune femme a affirmé avoir été violée par un collègue, Bruce Lehrmann, dans le bureau d'une ministre à l'issue d'une soirée arrosée en mars 2019, ce que nie la personne mise en cause. L'affaire, qui avait fait la Une des médias australiens, s'est brusquement close en octobre dernier en raison d'un vice de procédure.
Pour Zali Steggall, il est "nuisible et destructeur" de voir des allégations de viol utilisées à des fins politiques. "Ca a été une semaine très décevante et pénible au Parlement - déplore-t-elle - C'est un pas en arrière".
L'affaire Brittany Higgins avait provoqué de nombreuses manifestations, comme ici à Sydney, en mars 2021.
Blair Williams, chercheuse en politique du genre, estime que le Parlement australien est très en retard sur son temps. "Je pense que s'il y avait plus de femmes au Parlement, la culture serait peut-être un peu meilleure", estime l'experte.
Je pense que s'il y avait plus de femmes au Parlement, la culture serait peut-être un peu meilleure. Blair Williams, chercheuse en politique du genre
Bien que le nombre de femmes siégeant au Parlement ait augmenté en Australie, le mouvement a été beaucoup plus lent que dans d'autres pays. En 1999, l'Australie avait la 15e plus grande proportion de femmes dans son Parlement, selon les classements compilés par l'Union interparlementaire. Mais en 2022, elle n'apparaissait plus qu'à la 57e place.
Parmi les 1 700 témoignages rassemblés dans le rapport publié en 2021, l'une des personnes auditionnée mentionnait "des politiques en herbe qui n’hésitaient pas, dans certains cas, à vous prendre dans leurs bras, à vous embrasser sur la bouche, à vous soulever, à vous toucher, à vous donner des tapes sur les fesses, à faire des commentaires sur votre apparence, vous savez, les choses habituelles… La culture le permettait".
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