Les autorités saoudiennesont ordonné l'arrestation de la rappeuse saoudienne Asayel Slay. Dans son clip Mecca Girl (La fille de la Mecque), la chanteuse salue le courage des femmes vivant dans la plus grande ville sainte de l'islam, et les qualifie de "bonbons en sucre". Un texte qui offense les coutumes et les traditions de La Mecque, selon son gouverneur.
"Une fille de La Mecque, c’est tout ce dont vous avez besoin/Ne la contrariez pas, elle vous fera du mal ", chante Asayel Slay, foulard sur la tête, lunettes de soleil, et piercing dans le nez. Son texte rend hommage aux femmes originaires de la ville la plus sainte de l’islam,des femmes qu'elle présente comme plus belles et plus fortes que toutes les autres Saoudiennes.
Mais Mecca Girl n'est pas vraiment au gout des autorités saoudiennes qui souhaitent faire taire la chanteuse, dont l'allure est jugée irrespectueuse au regard de la tradition de la Mecque. C'est en tout cas ce que dit clairement le gouverneur de la Mecque Khaled al-Faiçal. Ce dernier a ordonné l’arrestation de la chanteuse, estimant sur Twitter que la jeune femme "offense les coutumes et les traditions du peuple de La Mecque et contredit l’identité et les traditions de sa bien-aimée population".
أمير مكة #خالد_الفيصل يوجه بإيقاف المسؤولين عن إنتاج فيديو أغنية الراب ( بنت مكه ) الذي يسيء لعادات وتقاليد أهالي مكة ويتنافى مع هوية وتقاليد أبنائها الرفيعة. .. تضمن توجيه سموه إحالتهم للجهات المختصه للتحقيق معهم وتطبيق العقوبات بحقهم.#لستن_بنات_مكهpic.twitter.com/zVqggEujfh
Ces propos ont suscité sur Internet une vague d'indignation. "Je viens de La Mecque et la seule chose que je trouve offensante est votre racisme et misogynie et votre guerre contre une jeune femme ", écrit sur Twitter un internaute saoudien, en référence notamment au fait que la jeune femme est noire.
"C'est si typique du gouvernement saoudien : inviter des influenceurs occidentaux pour laver les crimes du régime mais attaquer les véritables femmes saoudiennes qui essaient d'exprimer artistiquement leur identité culturelle", poste de son côté une internaute.
"Honteux et hypocrite!", s'insurge encore cet autre internaute.
Les autorités saoudiennes dépensent des millions pour attirer des artistes occidentaux pour se donner une bonne image à l’international mais en même temps emprisonnent Asayel Slay, une artiste rappeuse locale pour un simple clip. Honteux et hypocrite! https://t.co/1BP388C2f9
D'autres en revanche se rangent du côté des autorités de La Mecque. Derrière le hashtag #You_Are_Not_Mecca’s_Girls, des utilisateurs de Twitter s’en prennent aux origines africaines de la rappeuse, demandant à ce qu’elle soit emprisonnée, puis expulsée.
Un assouplissement de façade
Sous l’impulsion du prince héritier Mohammed Ben Salman, homme fort du royaume cherchant à le débarrasser de son image ultraconservatrice, l’Arabie saoudite encourage en effet l’essor des divertissements sur son territoire. Un festival de musique électronique a ainsi été organisé en décembre près de la capitale, auquel ont assisté de nombreuses Saoudiennes, parfois non voilées.
Mais cet assouplissement des normes sociales - bien accueilli par les habitants, dont les deux tiers ont moins de 30 ans - s'est aussi accompagné d'une répression des opposants. Les ONG ont ainsi dénoncé l'arrestation de journalistes, d'écrivains et de militants en novembre, et le royaume reste scruté par la communauté internationale sur son bilan en matière de droits humains.