Violences conjugales : la comédienne Judith Chemla, à visage découvert et tuméfié

Les photos d'un visage qui porte les stigmates de violences conjugales publiées sur Instagram... Ce visage est celui de Judith Chemla. Un an après les faits, l'actrice française a décidé de montrer et raconter : les violences, la plainte qu'elle a déposée, puis le harcèlement qu'elle a ensuite subi de la part de son ex-compagnon. Elle appelle les femmes, qui, comme elle sont victimes de tels actes, à ne "jamais" retirer une plainte.
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judith chemla
L'actrice française Judith Chemla a publié des photos d'elle sur Instagram, après avoir été victime de violences conjugales, il y a un an. "Je suis à bout. Que faut il pour qu’il me laisse tranquille ?", écrit-elle dans son post, publié lundi 4 juillet 2022. 
©capture d ecran/ instagram / Judith Chemla
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"N'ayez pas peur: ne retirez jamais, jamais, jamais une plainte que vous déposez. Ne la retirez jamais. On vous intimidera. On m'a intimidée, on m'a culpabilisée". Sa voix est si reconnaissable, mais aujourd'hui elle tremble, et la gorge que l'on sent nouée, tente tant bien que mal de retenir les sanglots. Judith Chemla a décidé de prendre la parole. De raconter ce qu'elle a subi, de mettre les mots sur ces violences, dont beaucoup n'osent parler. 

Je n’ai pas honte de cette photo. Mais lui devrait avoir honte.
Extrait du post de Judith Chemla, comédienne, sur Instagram

Ce cri d'alarme lancé sur les ondes de la radio France Inter intervient quelques jours après avoir décidé de publier sur Instagram trois photos de son visage. Son visage porte les stigmates de violences : un œil tuméfié et une pommette ouverte. Des photos prises en juillet 2021 après une agression de son compagnon, dont elle ne cite pas le nom, et avec lequel elle a une fille de cinq ans.

"Je n’ai pas honte de cette photo. Mais lui devrait avoir honte", écrit-elle sans sa publication.

"Je n'ai pas du tout prémédité cette prise de parole. Je n'ai jamais imaginé montrer ces photos", tient à préciser la comédienne lors de son entretien à la radio. "Je suis sidérée qu'il n'ait pas pu penser que c'était une chose possible, et qu'il devrait avoir honte et se tenir tranquille", insiste-t-elle, bouleversée.

Un rappel, en France le 3919 est en ligne 24h/24 et 7 jours/7 ►3919: la ligne d'écoute pour les femmes victimes de violences en veille continue en France

Après la plainte, la culpabilisation

L'agression de juillet 2021 l'avait poussée à porter plainte le lendemain, débouchant sur une garde à vue, une mise en examen et un contrôle judiciaire. L'actrice évoque "quatre mois d'un harcèlement intense", qui la pousse à déposer une deuxième plainte. Celle-ci aboutit à "quinze jours" de détention provisoire, rapporte-t-elle. Une condamnation à huit mois d'emprisonnement avec sursis a été prononcée le 12 mai dernier.

Malgré des menaces, malgré cette peine, il continue à penser que c'est une victime (...) Il se sent au-dessus des lois.
Judith Chemla, sur France Inter, le 6 juillet 2022

Mais, le harcèlement continue, témoigne-t-elle encore. "Je n'en peux plus. J'exige d'avoir la paix", peut-on lire sur son post Instagram, se demandant si elle devait à nouveau porter plainte.

"Malgré des menaces, malgré cette peine, il continue à penser que c'est une victime (...) Il se sent au-dessus des lois", mais "il devrait avoir honte et se tenir tranquille", déplore Judith Chemla lors de son entretien à la radio.

"Reprendre le combat"

L'affaire est, selon elle, symptomatique du refus des hommes violents d'admettre leur culpabilité. "Certaines femmes n'ont plus le courage de se battre, et j'ai des témoignages bouleversants qui me disent: grâce à vous je reprends le combat".

La revue spécialisée Variety avait révélé le 11 juillet 2021 l'affaire. Judith Chemla, qui devait présenter en avant-première au festival de Cannes le film Mes frères et moi de Yohan Manca, avait annulé au dernier moment sa venue. Selon le magazine, le réalisateur avait agressé l'actrice en lui jetant un portable au visage. Les faits, toujours selon Variety, se sont produits le 3 juillet 2021 dans une rue située non loin du théâtre du Rond-Point à Paris.

Actrice française montante, ancienne pensionnaire de la Comédie française, Judith Chemla, 37 ans, est notamment connue pour ses rôles dans Une vie de femme de Stéphane Brize et Camille rembobine de Noémie Lvovsky. Autrice, elle est aussi passée de l'autre côté de la caméra en réalisant Les enfants de Bohème, qui raconte les liens qu'essaient de garder des enfants avec leur mère. 

D'autres comédiennes avant elle avaient dénoncé les violences subies dans leur couple, comme Sandrine Bonnaire qui était ressortie inconsciente avec les os du visage fracturés, après une dispute avec un ancien compagnon il y a une vingtaine d'années.

A la suite de sa publication sur Instagram et de son intervention bouleversante sur les ondes de la radio, Judith Chemla a reçu de très nombreux soutiens sur les réseaux sociaux. "Vous avez raison avant nous nous taisions. J'ai failli mourir je n'ai jamais pardonné, Je suis partie. Son fils m'a dit il a changé, moi j'oublie pas", témoigne une internaute. Un autre twittos écrit "Est-ce que le fait que Judith Chemla, actrice, parle des violences conjugales qu'elle a subi va ENFIN faire bouger les choses ?"