Fil d'Ariane
Des milliers d'Indiens et d'Indiennes manifestent pour dénoncer le viol et le meurtre d'une soignante dans un hôpital de Calcutta. Le Premier ministre Narendra Modi réclame des sanctions accrues pour les violences contre les femmes, tandis que les médecins renforcent leur grève des soins non urgents.
Manifestation de nuit contre le meurtre et le viol d'une femme de 31 ans à Calcutta, en Inde, le 14 août 2024.
Des milliers de personnes manifestent depuis plusieurs jours en Inde pour dénoncer le viol et le meurtre d'une jeune femme, soignante dans un hôpital de Calcutta,. La foule, essentiellement composée de femmes, brandit des pancartes sur lesquelles on peut lire "Nous voulons que justice soit faite", "Ce ne sont pas les vêtements qui font le viol, c'est le violeur" ou encore "Pendez-le violeur, sauvez les femmes". Une quarantaine de manifestants a même pris d'assaut l'enceinte de l'hôpital où a eu lieu le meurtre, attaquant la police qui a riposté par des tirs de lacrymogène.
Des médecins protestent contre le viol et le meurtre d'une soignante à Calcutta, lors d'une veillée aux chandelles à Hyderabad, Inde, le 12 août 2024.
Le corps de la victime de 31 ans a été retrouvé avec de multiples blessures le 9 août 2024 dans un hôpital public de la capitale du Bengale-Occidental, où elle exerçait. Les médias indiens ont rapporté que la soignante assassinée avait été retrouvée dans la salle de séminaire de l'hôpital universitaire, ce qui suggère qu'elle s'y était rendue pour se reposer brièvement. L'autopsie a confirmé le viol et l'homicide.
La grève se poursuivra jusqu'à ce que toutes les demandes soient officiellement satisfaites.Dhruv Chauhan
Dans une pétition adressée au tribunal, les parents de la jeune femme disent soupçonner que leur fille a été victime d'un viol collectif, selon la chaîne indienne NDTV. Un homme qui travaillait dans le même hôpital, aidant les patients dans les files d'attente, a bien été arrêté, mais les policiers sont accusés d'avoir mal géré l'affaire. Aussi la Haute Cour de Calcutta a-t-elle transféré l'affaire au Bureau central d'enquête (CBI), une agence fédérale d'élite, afin d'"inspirer confiance au public".
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Dès le 12 août, les médecins travaillant dans les hôpitaux publics de différents Etats indiens interrompent les soins non urgents pour une durée "indéterminée", réclamant davantage de sécurité sur leur lieu de travail. Selon une enquête de l'Association médicale indienne, 75% des médecins en Inde ont déjà été confrontés à des violences. "Les médecins du pays se demandent ce qu'il y a de si difficile à promulguer une loi pour notre sécurité", questionne Dhruv Chauhan, du réseau des jeunes médecins de l'Association médicale indienne. "La grève se poursuivra jusqu'à ce que toutes les demandes soient officiellement satisfaites", assure-t-il.
Le 15 août, les soignants déclarent qu'ils vont multiplier les manifestations : "Nous intensifions nos protestations... afin de demander justice pour notre collègue", a déclaré Suvrankar Datta, clinicien et chercheur en radiologie à l'hôpital public All India Institutes of Medical Sciences (AIIMS) de New Delhi.
Les violences sexuelles à l'encontre des femmes sont fréquentes en Inde, avec en moyenne près de 90 viols par jour signalés en 2022 dans ce pays de 1,4 milliard d'habitants. Cette nouvelle agression a réveillé le souvenir du viol et du meurtre dont avait été victime une jeune femme dans un autobus en 2022 à New Delhi. Cette affaire, qui avait déclenché de gigantesques manifestations, était devenue révélatrice de l'incapacité de la société conservatrice indienne à gérer la violence sexuelle à l'encontre des femmes.
Sous la pression de l'opinion publique, le gouvernement a promulgué des peines plus dures pour les violeurs, et même la peine de mort pour les récidivistes. Plusieurs nouveaux délits sexuels ont également été introduits, notamment le harcèlement et des peines de prison pour les fonctionnaires qui n'enregistrent pas les plaintes pour viol.
Les comportements monstrueux à l'encontre des femmes devraient être sévèrement et rapidement punis.Narendra Modi
"Les crimes contre les femmes devraient faire l'objet d'enquêtes rapides, les comportements monstrueux à l'encontre des femmes devraient être sévèrement et rapidement punis", lance Narendra Modi depuis New Delhi le 15 août, lors des fêtes de l'indépendance, mais sans faire explicitement référence au meurtre de Calcutta.