“Walk in vagina“, le pouvoir des femmes au bout du canal vaginal

Lieu hautement symbolique, une ancienne prison sud-africaine à Johannesburg, dans laquelle fut incarcérée (deux fois) Winnie Mandela, l'ex femme de Nelson Mandela, est aujourd'hui l'abri d'une oeuvre artistique conceptuelle étonnante : un vagin haut et long de 12 mètres, réplique d'un canal vaginal, dans lequel il est possible d'entrer et de marcher.
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“Walk in vagina“, le pouvoir des femmes au bout du canal vaginal
“Walk in vagina“ de l'artiste sud-africaine Reshma Chhiba
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Visiteurs de cette installation démesurée, pensez à vous déchausser avant de pénétrer, au sens total de ce verbe, dans un sexe féminin. Reshma Chhiba, une jeune artiste sud africaine de 30 ans présente ainsi sa création : "C'est une réaction à l'ancien symbole de l'oppression. Presque jamais vous n'entendez les hommes parler de leurs organes sexuels avec haine et mépris. Les femmes, en revanche, ont très souvent honte de leur sexe…". Pendant que les promeneurs déambulent, les murs rouges capitonnés de velours écarlate résonnent de cris et de rires. La vulve est bordée de laine acrylique pour imiter les poils pubiens. L'installation artistique intrigue, voire dérange les Sud-Africains, bien ancrés dans une culture machiste dominante, et dans un pays qui connaît l'un des plus haut taux de violences contre les femmes. En témoigne encore le procès très médiatique de Oscar Pistorius, athlète culte qui a tué sa compagne en février 2013. Et près de 65.000 viols sont officiellement recensés chaque année dans un pays présidé par Jacob Zuma, un chef d'Etat qui a parfois abusé de sa position pour soumettre ses conquêtes féminines. Comme d'autres un peu partout dans le monde... Reshma Chhiba, jeune hindouiste pratiquante, a inventé un "Yoni" sonore. Le mot désigne le vagin, ou la vulve, en sanscrit, la langue des textes religieux hindous.  "C'est un vagin qui crie, dans un espace où furent autrefois enfermées des femmes", explique l'artiste. "Le vagin est un espace de pouvoir, qui se révolte contre la prison en criant, mais aussi en riant, en se moquant d'elle, mais il est aussi un espace sacré qu'il convient de respecter." L'artiste affirme ne pas avoir voulu provoquer, mais c'est raté. Nombre de réactions expriment une forte hostilité à son encontre. La jeune artiste sud-africaine n'a que faire des critiques. Pour elle, l'essentiel est de défier la culture patriarcale de son pays. Elle a consacré des années de recherches à la déesse hindoue Kali, divinité du Temps, de la mort et de la délivrance, mère destructrice et créatrice à la fois, qu'elle considère comme un symbole de défiance. Elle a été choquée par les critiques et les accusations de blasphème qui se sont abattues sur elle, notamment de la part d'Hindous, qui constituent une importante communauté en Afrique du Sud. Mais l'artiste a aussi reçu des soutiens, tels "Gender Links" ("Liens entre les sexes"), une association qui milite pour l'égalité homme/femme en Afrique du Sud, qui a félicité Reshma Chhiba pour son travail et pour avoir donné une nouvelle occasion de débattre d'un sujet resté secondaire dans les préoccupations des Sud-Africains.

La traversée des apparences

01.09.2013récit karine Henry, jt TV5MONDE
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