Rencontrée au Women's Forum de Deauville, Molly Ashby, PDG de Solera, une entreprise d'investissements financiers à Wall Street, a fait de la diversité son slogan. Avec succès. Elle croyait être imitée - cela n'a pas, ou pas encore, été le cas.
Molly Ashby, PDG de Solera, au Women's forum 2011. PHOTO : L. Baudu
Elle arrive, en costume pantalon gris, très chic. Mais là s'arrête la ressemblance avec les financiers de Wall Street – particulièrement sous-représentés au Women's forum de Deauville. Car Molly Ashby, PDG de Solera, une « private equity firm » basée à New York, a fait voler en éclat la tradition américaine, celle d'un monde financier ultra-masculin. « J'ai commencé ma carrière à la banque J.P. Morgan, raconte-t-elle. Mais j'étais convaincue qu'il existait une fenêtre d'opportunité pour lancer une entreprise d'investissements fondée sur la diversité ». Elle lance Solera, une « private equity firm », en 2000. Aujourd'hui, les financiers sont, à plus de 50% des financières chez Solera... PAS DE DISCRIMINATION POSITIVE POUR LES SOCIETES DIRIGEES PAR DES FEMMES L'entreprise fonctionne de la même façon que les autres « equity firms » - autrement dit, elle prend des participations dans des sociétés identifiées comme ayant un fort potentiel de croissance et elle les accompagne dans leur développement, le tout sans privilégier délibérément les entreprises détenues par des femmes. « La diversité qui règne à l'intérieur de notre firme a souvent pour résultat des investissements dans des entreprises féminines », relève la businesswoman. Les experts de Solera, qui recherchent avant tout une société et un leader à fort potentiel, semblent les trouver plus facilement parmi les femmes....Pas question de systématiser pour autant. «Nous sommes en rupture avec les traditions de Wall Street, qui ont longtemps privilégié des sociétés dirigées par des hommes, alors il n'est pas question pour nous de renverser cette tendance et de pratiquer une forme de discrimination en faveur des femmes », poursuit la PDG de Solera. UN SUCCES SANS PAREIL Le résultat en tout cas, c'est que les sociétés qui sont désormais épaulées par Solera affichent une belle santé, dans les secteurs les plus divers. Autant dire que la recette de Molly aurait pu inciter certains, dans les tours de Wall Street, à imiter son business model. « Je m'attendais à l'émergence de plusieurs petits Solera », confie d'ailleurs la financière. En fait, rien de tel ne s'est produit pour l'instant. Décidément, la tradition et les costumes rayés ont la vie dure à Manhattan. « Notre industrie doit vraiment évoluer », soupire Molly. Elle attend la concurrence avec impatience...
Ejectée d'une banque de Wall Street, Sallie Krawcheck n'a pas perdu son sens de l'humour
Sallie Krawcheck au Women's forum.
« J'ai déjà traversé le désert - plusieurs fois, en fait », remarque en riant Sallie Krawcheck en prenant le micro lors d'une des dernières réunions du Women's Forum de Deauville, hier. Celle que le magazine Forbes classait il y a encore quelque temps parmi les femmes les plus puissantes du monde s'est fait débarquer de Bank of America, où elle officiait en tant que patronne de la filiale « Global Wealth and Investment Management » depuis 2 ans. « Je ne sais absolument pas ce que je vais faire maintenant », affirme-t-elle, toujours en riant. C'est la première fois depuis son licenciement fracassant qu'elle s'exprimait en public. « Quand j'avais 20 ans, je pensais qu'à 46, je saurais où j'en étais – ce n'est pas le cas », poursuit-elle, en égrenant différentes étapes de son parcours. « A 30 ans, j'ai cru que ma vie était finie parce que je divorçais », confie-t-elle ainsi. Elle a rebondi. Et compte bien le faire encore. La sagesse en plus, peut-être. « Il est très difficile de changer les grosses entreprises de l'intérieur, dit-elle, surtout si celles-ci sont persuadées de faire du bon travail ». Cela vaut pour la stratégie comme pour « l'empowerment » des femmes à Wall Street. Elles restent en effet l'exception dans la finance américaine.