Discours d’ouverture de Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la francophonie (2012 - 2014), représentante personnelle du Président de la République à l'OIF 2ème Forum mondial des Femmes Francophones Kinshasa, le 3 mars 2014 Excellence Monsieur le Président de la République Démocratique du Congo ; Excellence Madame la Présidente de la République de Centrafrique ; Mesdames les Premières dames ; Monsieur le Premier Ministre ; Mesdames et Messieurs les Ministres ; Madame la Ministre du Genre, de la Famille et de l’enfant, chère Geneviève ; Messieurs Présidents du Sénat et de l’Assemblée Nationale de la République Démocratique du Congo ; Mesdames et messieurs les parlementaires ; Monsieur le secrétaire général de l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie ; Madame l’envoyée spéciale du secrétaire général des nations Unies pour la Région des Grands lacs ; Monsieur l’administrateur de l’Organisation Internationale de la Francophonie ; Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs ; Mesdames et Messieurs les participants ; Mesdames et Messieurs ; Je veux vous dire ma joie de me retrouver ici en République Démocratique du Congo pour le plus grand rassemblement international de femmes francophones : le Forum Mondial des Femmes Francophones ! Nous étions plus de 700 à Paris l’année dernière, nous sommes plus de 3000 aujourd’hui à Kinshasa… et demain, combien serons-nous ? Une force est en marche ! Chaque jour dans l’espace francophone la société civile se lève et se mobilise pour faire progresser la justice et l'égalité ! Chaque jour, des femmes se dressent et se tiennent debout pour faire avancer les droits de l’Homme… les droits des femmes. Au 19ème siècle, Stendhal affirmait que « l’admission des femmes à l’égalité parfaite serait la marque la plus sûre de la civilisation, et elle doublerait les forces intellectuelles du genre humain ». Aujourd’hui, on ne peut que constater les atteintes à leurs droits, à leur intégrité physique, à leur sexe, sous la férule de la religion ou de la tradition. Le Forum Mondial des Femmes Francophones est aujourd’hui incarné, il a le visage de toutes les femmes francophones réunies ici. Le Forum c’est vous ! Le Forum est une vague montante que rien n’arrêtera car elle est nourrie par votre engagement, par votre énergie, et par votre détermination. Les femmes rassemblées dans ce Forum vont instaurer un nouveau siècle des Lumières : partout où elles se rendront, elles seront les porteuses des valeurs de justice, d’égalité et de paix ! Le Forum Mondial des femmes francophones est l’expression d’une volonté qui est devenue réalité et que rien ne pourra plus arrêter. Ensemble nous pouvons transformer la société, ensemble nous avons le pouvoir de faire bouger les lignes, le pouvoir de rapprocher ce qui a été séparé, le pouvoir de réconcilier ce qui a été opposé, le pouvoir de réparer ce qui a été abîmé. Je pense tout particulièrement aux femmes congolaises, aux femmes de l’est si durement éprouvées et auxquelles l’espace francophone doit justice et dignité. Vous êtes, vous, femmes congolaises, toujours battantes, debout ! Vous êtes le courage, vous êtes la résilience qui inspire toutes les femmes francophones. Et c’est vous, femmes de République Démocratique du Congo, aux côtés de votre première dame, madame Olive KABILA. Merci à vous ! Merci à vous femmes de RDC. Oyé ! Pour les femmes de Bukavu… de Panzi,… de Minova, …de Goma,… de Kinshasa ! Oyé ! À vous toutes qui êtes ici rassemblées fières et fortes ! Nous sommes toutes à vos côtés dans la première mégalopole francophone d’Afrique sub-saharienne, dans le plus grand pays francophone du Monde : la République Démocratique du Congo, si essentielle à la vitalité de la Francophonie. C’est à Kinshasa, à l’occasion du XIVe Sommet de la Francophonie, que le Président de la République Française, François HOLLANDE, sur ma proposition, a annoncé, pour la première fois, le 13 octobre 2012, la création du 1er Forum Mondial des Femmes Francophones. Et, c’est vous femmes du Congo, c’est vous Kinshasa, qui avez fait naitre cette idée en moi. En accueillant le deuxième Forum Mondial des Femmes francophones, et après avoir assuré pendant deux années la présidence de la Francophonie, la RDC accueille le plus grand rassemblement mondial des femmes francophones, le plus grand rassemblement de la société civile. Femmes, hommes, société civile, organisations internationales, représentants politiques, représentants d’Etats, nous, le Forum Mondial des Femmes Francophones, nous proposerons à Kinshasa des recommandations à l’attention du 15e sommet de la Francophonie de Dakar, des recommandations qui seront la contribution directe des femmes francophones à la préparation du Sommet. Le premier Forum Mondial des Femmes Francophones, a permis des avancées pour les droits des femmes. Je pense au Président de la République, qui a soutenu dès le départ cette initiative; je pense à Laurent Fabius, le Ministre des Affaires Etrangères de la France, qui s’est personnellement impliqué et me demande de vous dire combien il sera attentif aux conclusions de nos travaux ; je pense enfin au Président Abdou Diouf, le Secrétaire Général de l’Organisation International de la Francophonie, que je considère comme le premier de nos militants, tant son adhésion à l’idée du Forum a été totale, immédiate et sans restriction. Je salue monsieur Clément DUHAIME pour son soutien indéfectible. Grâce à la formidable mobilisation du Forum des Femmes Francophones depuis l’appel que nous avions lancé à Paris, les lignes ont bougé. J’ai demandé au nom de la France, lors de la dernière conférence ministérielle de la Francophonie en novembre dernier, qu’une déclaration solennelle et spécifique aux droits des femmes francophones soit adoptée lors du Sommet de Dakar. Il est impérieux que tous nos chefs d’Etats et de Gouvernement fixent dans les textes politiques de la Francophonie la promotion, la protection, l’affirmation des droits des femmes. A l’instar de la déclaration de Bamako qui pose les principes démocratiques devant gouverner les Etats membres de la francophonie. Grace au Président DIOUF et à l’OIF, le premier réseau francophone pour l’égalité femme – homme a été créé le 23 octobre 2013 et Madame Ndioro Ndiaye a été élue en janvier dernier présidente de ce réseau. Le site Terriennes de TV5 MONDE est le portail officiel du Forum Mondial des Femmes Francophones et dispose de son propre réseau social. Je salue ici Marie-Christine SARAGOSSE, Présidente de FranceMédiaMonde sans laquelle le réseau Terriennes n’aurait jamais existé, et remercie Yves BIGOT, directeur général de TV5 Monde qui soutient activement et renforce ce projet. Parallèlement la paix et la démocratie ont progressé dans l’espace francophone. Les soldats africains et français ont fait triompher la liberté, la démocratie et les droits de l’homme en libérant de l’oppression extrémiste le Mali et en particulier les femmes maliennes. En RDC, les forces du M23 qui avaient fait du corps des femmes un champ de bataille, ont été vaincues… La lutte contre l’impunité de toutes les forces et de tous les groupes armés, auteurs de violences faites aux femmes à l’Est de la RDC, est relancée ! C’est une bataille à laquelle les femmes francophones sont attachées. Marie Robinson, qui nous fait l’honneur d’être parmi nous, m’a assuré que la question des femmes serait constamment prise en compte dans le traitement politique de la situation dans la région des grands lacs. C’est une femme politique aguerrie, la plus francophone des femmes anglophones. Oui l’implication des femmes dans toutes les décisions affectant la stabilité est primordiale, fondamentale, et nous avons la chance et l’honneur d’avoir parmi nous aujourd’hui Madame Catherine Samba-Panza, qui a été élue Présidente de la transition de la République Centrafricaine pour mener à bien une mission de stabilisation. Madame Samba-Panza, je me tourne vers vous, et avec moi toutes les femmes de cette assemblée, pour vous dire combien nous sommes solidaires ; le forum sera votre socle. Nous sommes avec vous, nous avons confiance en vous, et tout ce que vous accomplirez aura une résonnance particulière dans le cœur et dans l’esprit de toutes les femmes de l’espace francophone pour lesquelles vous devenez un symbole. La France et les forces africaines de la MISCA, toutes francophones (congolaises, camerounaises, burundaises, tchadiennes, rwandaises), se sont engagées pour la sécurité humaine en République centrafricaine. En mai dernier, ce sont bien des femmes centrafricaines qui sont venues m’alerter sur le sort réservé aux femmes dans ce conflit. C’est ainsi que j’ai conduit en juillet dernier, à la demande du Président de la République, une tournée dans la sous-région, tous mobilisés pour la RCA. En plein été, c’est avec le Président HOLLANDE que nous avons reçu les associations humanitaires évoluant en RCA. Face aux exactions, viols, massacres, subis en premier lieu par les femmes et les enfants, nous ne pouvions pas rester sans agir. Mesdames et Messieurs, Nous le voyons, les avancées ne peuvent pas nous faire oublier tous les défis qui restent à relever pour l’égalité réelle entre les hommes et les femmes et pour le respect de leurs droits : nous le savons, les droits des femmes ne sont jamais des acquis. Les droits des femmes sont le baromètre implacable de l’évolution des sociétés. Au-delà de l’égalité juridique formelle, nous devons nous engager dès aujourd’hui pour une égalité réelle entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes de demain. C’est pourquoi nous avons souhaité que ce 2e forum mette au centre de ses discussions la scolarisation des jeunes filles jusqu’à l’âge de 16 ans ; et je ne peux que me réjouir que la République Démocratique du Congo ait décrété 2014, année de l’éducation. Une fille scolarisée jusqu’à 16 ans ne perpétuera pas la chaine des mutilations sexuelles : elle ne prendra pas le couteau pour répéter ce geste mortifère ! Une fille scolarisée jusqu’à 16 ans ne pourra pas être mariée de force avant sa puberté ! Les mariages précoces et les mutilations sexuelles sont de véritables freins au développement. La scolarisation des jeunes filles jusqu’à 16 ans est le premier des droits pour les femmes, elle est leur tremplin pour le développement ! Cet objectif n’est pas une utopie, cet objectif doit être le nôtre, nous pouvons l’atteindre dans l’espace francophone où, dans 14 pays, l’école n’est pas obligatoire jusqu’à 16 ans. Il s’agit de compenser les effets de longue durée causés par l’absence des filles à l’école, réparer les torts séculaires faits aux femmes. Si l’on ne veut pas amputer les Etats de plus de 50% de leur capacité humaine à se développer, il est impérieux que des investissements majeurs se fassent en faveur de la scolarisation des jeunes filles. Femmes actrices du développement, Femmes et éducation, Femmes et pouvoirs, Femmes et paix, Toutes les femmes qui participeront à la transformation de la société auront plus de chances d’y parvenir si elles ont la possibilité d’aller à l’école jusqu’à 16 ans ! Ces femmes existent : elles sont là ! Vous êtes là ! Le 27 janvier dernier, les Femmes Tunisiennes autour desquelles nous nous sommes mobilisées ont vu leurs droits et leur égalité avec les hommes constitutionnalisés. C’est une victoire. Les visages des femmes francophones se retrouvent désormais sur ceux de la Première Ministre du Sénégal, Aminata TOURE et depuis le 23 janvier, de la Présidente de la République centrafricaine, Madame Catherine Samba-Panza. Il y a aussi et bien évidemment, le visage de Madame Geneviève Inagosi, Ministre du genre de la RDC, que je tiens à remercier très chaleureusement pour avoir organisé ce Forum avec tant de force. Je souhaite aussi féliciter l’OIF et le Ministère des Affaires Etrangères. Monsieur le Président de la République, Monsieur Joseph Kabila, merci pour votre accueil, merci pour la force de votre engagement auprès de toutes les femmes francophones ici présentes. Merci madame Olive Kabila pour votre engagement. J’invite toutes les femmes qui savent murmurer aux oreilles de ceux qui décident à porter haut et fort les voix des milliers de femmes qui assistent à ce Forum. Mesdames, Messieurs, « Même s’il y a toujours de la peur en nous, relevons nos manches et mettons-nous au travail ensemble ». Comme l’a dit Hillary Clinton dans un de ses discours. « Nous sommes prêtes à faire éclater le plus haut plafond de verre ». Nous posons ici les bases du destin de générations entières de filles et de femmes ! Tel un torrent charriant avec force les obstacles qui tentent de freiner son courant, le forum est en marche, rien ne l’arrêtera… Yamina Benguigui